Salman al-Awdah sous la menace d’une peine capitale depuis 6 ans
Demandons la libération de Salman al-Awdah !
Téléchargez la lettre, personnalisez-la avec vos coordonnées et retournez-la par voie postale ou par voie électronique à Catherine Colonna, ministre de l'Europe et des Affaires étrangères.
Pourquoi Salman al-Awdah a été arrêté ?
Ce dimance 10 septembre 2023 marque les six ans de détention du prédicateur réformiste Salman al-Awdah. Son arrestation le 10 septembre 2017 est une réaction directe à un tweet publié la veille dans lequel il exprime son souhait de mettre fin à la crise politique entre le Qatar et l’Arabie saoudite, à la suite de la rupture diplomatique entre d’une part l’Arabie saoudite et plusieurs de ses alliés et de l’autre le Qatar en juin 2017. Le frère de Salman, Khaled, est également arrêté pour avoir révélé l'arrestation du religieux sur Twitter et a depuis été condamné à cinq puis huit ans de prison. Le reste de sa famille résidant en Arabie saoudite est interdite de quitter le territoire national tandis que l’un de ses fils, Abdullah Alaoud, résidant aux États-Unis, qui s’est vu refusé le renouvellement de son passeport saoudien, continue de subir différentes formes de harcèlement de la part des autorités saoudiennes.
Toujours sous la menace d’une condamnation à mort
Le 5 janvier 2021, bien que l’Arabie saoudite et ses alliés aient rétabli leurs liens diplomatiques avec le Qatar, la situation reste inchangée pour Salman al-Awdah et ses proches. Cela fait maintenant plus de deux ans qu’il est détenu sans qu’il n’y ait eu la moindre audience. Cependant la condamnation à mort récente de Mohammed al-Ghamdi, un professeur saoudien retraité, pour quelques tweets critiquant les violations des droits humains et la détention de certains prisonniers politiques comme Salman al-Awdah, nous rappelle que la menace qui plane sur ce dernier est toujours bien réelle. Selon le frère de Mohammed al-Ghamdi, Saeed al-Ghamdi, un religieux et opposant important saoudien éxilé au Royaume-Uni, sa condamnation serait aussi une manière de le punir lui pour son refus de revenir sur le territoire saoudien.
Des conditions de détention extrêmes
Depuis son arrestation, il est détenu à l’isolement continu, assimilable à un traitement cruel, inhumain ou dégradant voire à un acte de torture, selon les circonstances. Détenu à la prison centrale de Dahban près de Djeddah puis à celle de Hayer près de Riyad depuis la fin 2019, al-Awdah endure de nombreux mauvais traitements pendant ces premiers mois de détention : privation de sommeil, interrogatoires répétés, absence de visites médicales et de traitements médicaux. Il est également enchaîné et ses yeux bandés à plusieurs reprises. Ce n’est qu’en janvier 2018, alors que son état de santé se dégrade sérieusement, qu’il est brièvement amené à l’hôpital. Le mois suivant, il peut enfin contacter sa famille et recevoir leur visite pour la première fois. En raison de ses conditions de détention très dures, ses proches ont constaté une dégradation alarmante de sa santé : il a perdu la moitié de sa vue et de son audition, et était apparu très faible et amaigri lors des dernières comparutions en sa présence. Il demeure très difficile pour ses proches d’obtenir des droits de visites et les appels sont suspendus de manière indéfinie depuis plusieurs mois.
Contexte
Salman al-Awdah est un membre éminent du mouvement islamiste et réformiste Sahwa apparu dans les années 90, opposé à la présence des troupes américaines sur le sol saoudien en réponse à l’invasion du Koweït par l’Irak. Il est l’un des leaders du Comité pour la défense des droits légitimes créé en 1993, un des premiers groupes politiques à s’opposer à la dynastie régnante des Saoud en Arabie saoudite. Ce mouvement se considère comme un groupe de pression pour une réforme pacifique et pour l'amélioration des droits de l'homme en Arabie saoudite dans un cadre islamique. Il s'insurge également contre ce qu'il perçoit comme la corruption politique du gouvernement et de la famille régnante saoudienne. En 1994, il est arrêté et emprisonné avec d’autres membres du courant réformiste Sahwa pour ses activités prétendument anti-gouvernementales. Il est libéré en 1999 sans avoir été condamné. Il devient un religieux influent (13 millions de followers sur Twitter) et s’engage dans la demande d’une réforme du régime saoudien vers plus de démocratie et de liberté. En 2011, il se montrait favorable aux mouvements populaires qui secouent la région. Il continua par la suite de plaider pour un système politique respectant l’Etat de droit et la liberté d’expression.
Une procédure judiciaire longue et opaque
Depuis le début de son procès devant la Cour pénale spéciale de Riyad le 4 septembre 2018, le procureur a requis la peine de mort sur la base de 37 chefs d’accusation, sans que la défense ait été informée au préalable des charges portées contre lui. Créée en 2008, cette cour, normalement en charge des affaires terroristes, permet en réalité de contourner le droit à un procès équitable et est notamment utilisée pour poursuivre et condamner les opposants et militants critiques du royaume. Pendant trois ans, le procès de Salman al-Awdah s’éternise avec des audiences régulièrement ajournées, reportées ou avancées, la plupart du temps sans explication. La dernière audience a eu lieu le 14 mars 2021 en la présence d’al-Awdah et n’a duré que quelques instants avant d’être reportée à juillet 2021, audience qui n’a finalement jamais eu lieu.