Cameroun
Appel à mobilisation

Le journaliste Thomas Awah Junior doit être libéré

Le journaliste camerounais Thomas Awah Junior, arrêté en janvier 2017 croupit dans une cellule de la prison centrale de Kondengui, à Yaoundé. Condamné abusivement à onze ans de prison ferme par la justice militaire, sa privation de liberté est arbitraire selon le groupe de travail sur la détention arbitraire du Conseil des droits de l’Homme des Nations unies.
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Le 15 / 05 / 2024

Mobilisons-nous pour demander la libération du journaliste Thomas Awah Junior !

Téléchargez la lettre, personnalisez-la avec vos coordonnées et retournez-la par voie postale ou par voie électronique au président de la République du Cameroun.

 

Qui est Thomas Awah Junior ?

Thomas Awah Junior, 55 ans, est un journaliste camerounais – ancien présentateur anglophone de la chaîne Equinoxe TV de 2009 à 2015, puis correspondant dans la région Nord-Ouest pour la chaîne Afrik 2 Radio – impliqué dans le suivi médiatique des manifestations des mouvements anglophones fin 2016.

Le 2 janvier 2017, il est arrêté, sans mandat, par des gendarmes à Bamenda alors qu’il est en reportage pour Afrik 2 Radio au cours d’une journée « ville morte », décrétée par les mouvements anglophones. Les gendarmes trouvent sur lui des documents du Conseil national sécessionniste du Sud du Cameroun (SCNC), un mouvement anglophone qui milite pour l'autodétermination des régions du Nord-Ouest et du Sud-Ouest du Cameroun. Ce mouvement est alors légal. Il sera interdit par les autorités camerounaises deux semaines plus tard, le 17 janvier 2017, au motif qu’il met en péril la sécurité de l’Etat.

En état d’arrestation, Thomas Away Junior est emmené dans un centre de détention où il est interrogé durant quatre heures à propos du SCNC. Il est ensuite détenu près de huit heures au poste central de la police à Bamenda puis transféré à Yaoundé et placé en détention provisoire à la prison centrale de Yaoundé.

Un civil condamné par une justice militaire

Bien qu’il ne soit pas un militaire ni une personne ayant fait usage d’une arme de guerre, les autorités camerounaises décident de juger Thomas Away Junior devant le tribunal militaire de Yaoundé. Le 7 janvier 2017, son procès s’ouvre. Le 25 mai 2018, la justice militaire le condamne à onze ans de prison pour « terrorisme, hostilité à la patrie, sécession, révolution, insurrection, diffusion de fausses nouvelles et outrage à une autorité civile » sur la base de la loi portant répression des actes de terrorisme.

À la suite d’une manifestation des détenus de la prison centrale de Kondengui, le 22 juillet 2019, dénonçant la surpopulation, le journaliste est inculpé de « rébellion de groupe, incendie criminel, tentative d'évasion, pillage, coups et blessures et vol » par le tribunal de première instance d'Ekounou, le 8 août 2019.

Le 9 septembre 2019, Thomas Awah Junior est condamné à trois ans de prison supplémentaires pour « rébellion de groupe, destruction de biens et résistance à l'ordre administratif ». Dans la première affaire, le tribunal d'appel militaire annule, le 19 août 2021, les condamnations pour « terrorisme », mais confirme les autres chefs d'accusation.

Une détention arbitraire selon des experts des Nations unies

En mai 2023, dans un avis rendu public, le Groupe de travail des Nations unies sur la détention arbitraire estime que les conditions « alarmantes » dans lesquelles Thomas Awah Junior est détenu aggravent son état de santé. Les conditions de détention ont exacerbé la toxoplasmose, la tuberculose et la pneumonie préexistantes de Thomas Awah Junior. Le Groupe demande aux autorités du Cameroun de le libérer immédiatement et de lui accorder une indemnisation pour sa détention arbitraire.

Le 25 août 2023, ses Conseils déposent un appel devant la Cour suprême, qui, jusqu’à ce jour, n’a toujours pas fixé une date d’audience.

La santé physique et mentale de Thomas Awah Junior est fragile. Sa place n’est pas en prison.

Contexte

Octobre-novembre 2016 : des avocats, enseignants et étudiants anglophones protestent contre la « francophonisation » des systèmes législatif et éducatif en vigueur dans les régions anglophones du Nord-ouest et Sud-ouest et contre la marginalisation de leur territoire.

Les autorités camerounaises répriment violemment les manifestations pacifiques. Les villes de Bamenda, Buea, Kumba et Kumbo sont particulièrement touchées par la répression. Des centaines de personnes sont arrêtées. Plus de dix manifestants sont tués par balles entre octobre 2016 et février 2017. Les autorités camerounaises tentent le « black-out » : elles interdisent des organisations de la société civile, suspendent Internet et les lignes téléphoniques pendant trois mois entre janvier et avril 2017. Des groupes de militants anglophones répondent par des stratégies de désobéissance civile (boycott des écoles et opérations « ville morte »). En octobre 2017, les forces de défense et de sécurité tirent à balles réelles sur des manifestants qui célèbrent symboliquement l’indépendance des régions anglophones. Vingt personnes sont tuées, de nombreuses autres blessées. Des centaines de personnes sont de nouveau arrêtées. Des milliers fuient. Dès lors, les voix modérées anglophones sont supplantées par les appels à la lutte armée des groupes séparatistes. La guerre civile commence.

Les symboles de l’État et les forces de défense et de sécurité sont attaqués. S’ensuit une militarisation des régions anglophones – avec notamment l’arrivée du Bataillon d’intervention rapide (BIR) – et une répression tous azimuts qui renforce encore davantage l’émergence de mouvements plus radicaux et violents au sein de la société anglophone. Entre 2016 et 2019, cette guerre de basse intensité a coûté la vie à plus de 3 000 personnes et déplacé plus de 500 000 personnes. Aujourd’hui, la situation sécuritaire dans les régions anglophones est incontrôlable. Il s’agit d’une « No go zone » où il est dangereux de se rendre. Une partie de ce territoire est administrée par des groupes séparatistes armés, qui sèment la terreur au sein des populations civiles, notamment par des exécutions sommaires de civils considérés comme proches des autorités et des attaques d'établissements scolaires dont plusieurs meurtrières. Ces groupes opèrent également par des actions de guérilla contre les forces de sécurité camerounaises et utilisent de plus en plus d’engins explosifs improvisés faisant régulièrement des victimes. Par peur des attaques des groupes séparatistes, de nombreux fonctionnaires ont fui.

L’armée lance régulièrement des opérations de contre-guérilla qui se soldent parfois par des exécutions sommaires de civils. Lorsque des militaires sont tués lors d’embuscades menées par des séparatistes, il n’est pas rare que des opérations de représailles soient menées et ciblent les civils, considérés comme sympathisants des groupes armés : incendies de bâtiments, exécutions sommaires, arrestations suivies d’actes de tortures… Les forces armées peuvent s’appuyer localement sur des milices pro-gouvernementales qui assurent la sécurité et le renseignement dans certains territoires.

En différents endroits, de nouveaux acteurs apparaissent sans avoir de liens avec des groupes séparatistes : il s’agit de coupeurs de route et autres groupes criminels qui profitent du chaos ambiant pour rançonner citoyens et commerçants.

Depuis 2017, ce conflit interne a provoqué une crise humanitaire de grande ampleur à laquelle les autorités camerounaises n'ont pas apporté de solutions. Au contraire, elles restreignent la liberté des associations humanitaires présentes sur le terrain. Aujourd’hui, les civils n’ayant pas pu fuir la région sont régulièrement pris pour cible par les deux parties au conflit.

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