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Algérie
Appel à mobilisation

La LADDH, principale organisation de défense des droits de l’homme, dissoute en catimini

La Ligue algérienne pour la défense des droits de l’homme (LADDH) a appris vendredi dernier, via une publication sur les réseaux sociaux, que le tribunal administratif d’Alger avait prononcé le 29 juin dernier sa dissolution. La totalité de la procédure s’est faite sans que la LADDH n’en ait eu la moindre connaissance.
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Façade de la Ligue algérienne pour la défense des droits de l'homme. © Photo DR
Le 25 / 01 / 2023

Mobilisons-nous pour demander la réouverture de la LADDH !

Qu'est-ce que la LADDH ?

Quelle ne fut pas la surprise pour les membres de la LADDH que de découvrir sur les réseaux sociaux, le vendredi 20 janvier 2023, des photos prises d’un jugement prononçant sa dissolution. Sur les documents fuités, il apparait que le ministère de l’Intérieur a introduit devant le tribunal administratif d’Alger, le 4 mai 2022, une requête demandant la dissolution de la LADDH. Le tribunal statue en ce sens le 29 juin, et le jugement est publié le 29 septembre sans avoir été communiqué à la LADDH qui n’a, à aucun moment, été informée de cette procédure. Le jugement ne présente d’ailleurs que les arguments du ministère de l’Intérieur, qui reproche, en résumé, à la LADDH d’avoir fait son travail de défense des droits humains, notamment devant l’ONU et à travers des réseaux internationaux, assimilable en cela à des activités visant à menacer l’unité du pays et à le déstabiliser. Ce lundi 23 janvier, l’un des bureaux les plus actifs de la LADDH, à Bejaïa en Kabylie, a été fermé par les autorités.

La révélation de ce jugement intervient un jour avant la visite de la secrétaire d’État adjointe américaine, Michele Sison, chargée des Organisations internationales, qui souhaite notamment discuter de l’importance des droits humains alors que l’Algérie comme le Maroc (où elle se rendra par la suite) viennent de rejoindre le Conseil des droits de l’homme des Nations unies. Une des raisons qui pourrait expliquer la non communication de cette décision est le récent Examen périodique universel de l’Algérie qui s’est déroulé le 11 novembre 2022, et durant lequel les États-Unis, l’Allemagne et le Royaume-Uni ont critiqué le harcèlement et l’emprisonnement de journalistes et défenseurs des droits humains, ont demandé l’abolition de l’article 87 bis du Code pénal qui « contient une définition exagérément vaste du terrorisme » et de « retirer les accusation d’atteinte à l’unité nationale ». Autre élément important, le gouvernement algérien a imposé le report de la visite pour la huitième fois du Rapporteur spécial de l’ONU sur les droits à la liberté de réunion pacifique et à la liberté d’association à 2023 alors qu’il était initialement prévu pour septembre 2022.

Contexte

Cette attaque sans précédent contre la LADDH s’inscrit dans une escalade des répressions menées par le régime contre toutes les voix libres et critiques du pouvoir en place. Dernièrement, Ihsane El Kadi, fondateur et directeur des médias indépendants Maghreb Emergent et Radio M, a été arrêté fin décembre 2022 avant d’être placé en détention provisoire quelques jours plus tard pour « collecte illégale de fonds et atteinte présumée à la sûreté de l’État », décision confirmée lors d’un jugement le 16 janvier, sans la présence de ses avocats en raison de l’avancement inopiné de la date de l’audience. Ce journaliste avait déjà été condamné le 7 juin 2022 à six mois de prison ferme pour un article d’analyse sur le mouvement du Hirak, un large mouvement populaire de protestation, principalement actif de 2019 à 2021, contre la réélection de Aziz Bouteflika et plus généralement contre le système politique toujours en place.

De nombreux mouvements et militants s’inscrivant dans le Hirak et ses demandes de réforme et de démocratisation du système politique algérien ont depuis été ciblés par le régime et poursuivis par la justice. D’autre associations comme le Rassemblement Actions Jeunesse (RAJ) et SOS Bab El Oued, ainsi que des mouvements politiques comme le Parti socialiste des travailleurs (PST), le Mouvement démocratique et social (MDS) et l’Union pour le changement et le progrès (UCP) ont été inquiétés ou dissouts, ou leurs dirigeants poursuivis voire incarcérés au cours des deux années passées. Toutes ces organisations visées ont en commun leur engagement dans le mouvement du Hirak, leur soutien aux détenus d’opinion et leur appartenance au Pacte de l’alternative démocratique (PAD), un regroupement d’organisations politiques et de la société civile qui a été créé en juin 2019 avec l’ambition de construire une alternative démocratique au régime en place.

Cette intensification de la répression s’opère alors que le pays est actuellement courtisé par de nombreux pays occidentaux en raison de la crise énergétique provoquée suite à la guerre en Ukraine et l’arrêt des exportations du gaz russe qui s’en est suivi. En effet, l’Algérie dispose de larges réserves de gaz et exporte déjà une grande partie de sa production vers l’Europe. La France s’est spectaculairement rapprochée de l’Algérie au cours de l’été 2022 à l’occasion d’une visite officielle du président Emmanuel Macron en Algérie. Depuis, les visites de haut-rang de succèdent avec la Première ministre Elisabeth Borne et une importante délégation française en octobre 2022, et le ministre de l’Intérieur Gérald Darmanin en décembre 2022. Le chef de l’état-major algérien, le général Saïd Chengriha, a entamé ce lundi 23 janvier une visite officielle en France, une première depuis 17 ans pour un chef de l’armée algérienne. Une visite officielle du président algérien Abdelmadjid Tebboune est également prévue en mai 2023. Pendant ce temps, la nouvelle cheffe du gouvernement italienne, Giorgia Meloni, vient tout juste de finir une visite officielle en Algérie avec comme sujet principal la question des exportations de gaz.

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