Mexique
Appel à mobilisation

Kenia Hernández est toujours arbitrairement détenue

Kenia Hernández est détenue arbitrairement depuis plus de deux ans dans une prison de haute sécurité, en raison de ses activités pacifiques en faveur des communautés autochtones au Mexique. Elle est poursuivie dans 10 affaires pénales et détenue dans des conditions indignes qui menacent sa santé.
AAM_Hernández_Carrousel_20230330

Mobilisons-nous pour la libération de Kenia Hernández !

Qui est Kenia Hernández?

Originaire de la communauté ñomdaa dans l’État de Guerrero, Kenia Inés Hernández Montalvan est une avocate et défenseure des droits de longue date au Mexique. Elle est fondatrice du Collectif Zapata Vive, une association qui lutte pour le droit à la terre et résiste pacifiquement aux modèles de développement néolibéraux de l’État mexicain.

Entre juin et octobre 2020, elle a été arrêtée deux fois sur de fausses accusations, visant à transformer ses revendications pacifiques en infractions pénales. Au cours de son procès pénal, Kenia a subi des graves violations de ses droits. Elle a été condamnée à plus de vingt ans de prison pour le crime de vol avec violence, bien qu’il ait été prouvé qu’elle était à plus de 600 kilomètres du lieu des événements. Elle est également poursuivie dans huit autres affaires au niveau fédéral, accusée du crime présumé d’« attaques aux voies de communication ». Les avocats de Kenia estiment que cette campagne judiciaire est menée par des acteurs corporatistes, et les autorités locales, en raison de ses engagements.

Selon la loi mexicaine, l’infraction dont Kenia Hernández fait l’objet était considérée comme non grave au moment de l’accusation. Cela signifie qu’elle aurait la possibilité de faire face à son procès pénal en liberté. Cependant, le juge fédéral a décidé de la placer dans une prison de haute sécurité, affirmant qu’elle est une femme dangereuse qui manifeste trop. Il a également estimé que son genre ne doit pas être pris en considération dans son procès, car à son avis elle n’est pas une « femme soumise ». Cette situation a entraîné de nombreuses violations des droits à l’encontre de Kenia et de sa famille, étant donné qu’elle est mère de deux enfants et qu’elle est le soutien économique de ses enfants et de ses parents.

Bien que Kenia ait déjà été condamnée à deux reprises, les huit autres affaires pénales qui figurent à son dossier pourraient être suspendues, si elle parvient à conclure un accord de réparation avec son plaignant CAPUFE (Routes et ponts fédéraux de rentrées et de services connexes pour ses acronymes en espagnol). Pourtant, cet organe décentralisé du gouvernement fédéral a refusé cette possibilité. En conséquence, en décembre 2022, le Centre des droits humains Zeferino Ladrillero, partenaire de longue date de l’ACAT-France, a lancé une campagne pour demander aux autorités compétentes du gouvernement mexicain un accord de réparation pour Kenia, qui permettrait sa libération.

Contexte

Une défenseure criminalisée

En raison de son travail de défenseure, Kenia a reçu plusieurs menaces de mort de la part de groupes armés de l’État de Guerrero. Cette situation l'a obligée à quitter son territoire et à chercher protection dans la ville de Mexico, d’où elle a continué ses combats. Un de ses modes d’action pour être entendue, comme pour beaucoup d’associations mexicaines, a été l’occupation des guichets de péage d’autoroute. Loin d’entraver la circulation ou de voler l’argent des automobilistes, il s’agit de les laisser passer gratuitement en les sensibilisant aux causes défendues.

Kenia Hernández doit subir les conséquences de son activisme en étant privée de sa liberté dans des conditions de détention alarmantes. Des organisations de défense des droits humains ont effectué des visites à l’établissement où elle est détenue, et ont documenté au moins treize violations des droits fondamentaux. Parmi celles-ci figure le droit à la santé, puisqu’ il y a une grave insuffisance de médicaments et que la disponibilité des médecins est extrêmement limitée. Entre autres, la nourriture fournie aux détenues a provoqué une intoxication alimentaire chez plus de 700 femmes en octobre 2022. De plus, Kenia n'a droit qu'à un appel téléphonique de dix minutes par semaine, son seul moyen d'être en contact avec ses avocats et sa famille.

Le cas de Kenia n’est pas un fait isolé. Au Mexique, des autorités politiques et des médias proches du pouvoir mènent régulièrement des campagnes pour discréditer et diffamer les défenseurs et défenseures des droits humains. La détention arbitraire de Kenia n'est qu'un exemple de la criminalisation de ces activistes par l'État mexicain, qui encourage la stigmatisation collective et envoie des messages d'intimidation à leur égard.

À cet égard, la Commission interaméricaine des droits de l'homme, dans l'un de ses communiqués de presse, a mentionné le cas de Kenia en soulignant qu'il s'agissait d'un exemple de criminalisation de la protestation au Mexique. Dans le même ordre d’idées, en août 2022, le Rapporteur spécial sur la situation des défenseurs des droits de l'homme, le Groupe de travail sur la détention arbitraire et le Rapporteur spécial sur les droits des peuples autochtones de l'ONU ont demandé la libération immédiate de Kenia Hernández. Ils ont fait part à l'État mexicain de leur inquiétude quant à l'ouverture constante de procédures d'enquête criminelle à son encontre, dans le but de la maintenir privée de liberté. Selon les experts, cela constitue des représailles directes à ses activités légitimes et pacifiques en faveur de la liberté d'expression, de la liberté de réunion et d'association. Enfin, ils demandent au gouvernement mexicain d'adopter d'urgence toutes les mesures nécessaires pour protéger les droits et libertés qui ont été violés à l'encontre de la défenseure.

  • Détention
  • Torture