Mexique
Communiqué

La torture des plus défavorisés, une pratique endémique

La torture reste une pratique généralisée au Mexique. L’écrasante majorité des victimes ne porte pas plainte par peur de représailles ou par découragement tant l’impunité est systématique pour les tortionnaires.
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Crédits : Jesús Villaseca Pérez / Flickr Creative Commons
Le 26 / 06 / 2014

Comme l’a rappelé le Rapporteur spécial de l’ONU sur la torture, Juan Méndez, en visite au Mexique du 21 avril au 2 mai 2014, la torture reste une pratique généralisée dans le pays [1]. L’écrasante majorité des victimes ne porte pas plainte [2] par peur de représailles ou par découragement tant l’impunité est systématique pour les tortionnaires.

Parmi les principales victimes de torture, on retrouve les habitants des quartiers pauvres – notamment les jeunes hommes – et les migrants centraméricains, sujets aux discriminations et stigmatisés en tant que délinquants. C’est notamment le cas dans les États frontaliers du Nord, Chihuahua et Coahuila, carrefours de nombreux trafics (drogue, armes, traite d’êtres humains...) où les autorités ont cherché à répondre par la manière forte sans véritable contrôle des forces de l’ordre et des opérateurs de justice.

Le Centre des droits de l’homme Paso del Norte (CDHPN), basé à Ciudad Juárez, a recueilli 113 plaintes pour tortures dans l’État de Chihuahua depuis 2012, la plupart commises par des policiers de l’Etat. « Malgré les efforts du gouverneur César Duarte pour faire passer l’Etat de Chihuahua comme un endroit sûr afin d’attirer les investissements étrangers – comme lors de son passage en France et en Europe la semaine dernière. Le Chihuahua demeure un Etat où les violations des droits de l’homme sont constantes. La torture y est très fréquemment utilisée pour fabriquer des coupables » témoigne Diana Esther Morales Rincón, avocate du CDHPN.

« La semaine dernière le président Obama a qualifié de crise humanitaire urgente l’afflux massif de migrants mineurs isolés au sud des États-Unis (90 000 attendus fin 2014). Ce dont on oublie de parler, c’est le sort réservé aux migrants sur le sol mexicain. Ils sont dans un état de vulnérabilité face aux militaires, policiers ou agents de l’Institut national de la migration, complices de bandes criminelles ou auteurs directs de mauvais traitements et tortures. Ils cherchent à extorquer de l’argent, boucler des affaires ou procéder à des expulsions rapides. » explique Javier Martínez Hernández, avocat à la Maison du migrant de Saltillo, Coahuila. De 2013 à mai 2014, uniquement pour la ville de Saltillo, l’ONG a enregistré 40 témoignages de migrants victimes de tortures perpétrées par des policiers municipaux [3].

Prouver qu’il y a eu torture n’est pas synonyme de justice pour les victimes. Selon Anne Boucher, responsable Amériques à l’ACAT, « Au cours des derniers mois, plusieurs des victimes de tortures pour lesquelles nous nous sommes mobilisés dans l’État de Chihuahua ont été libérées [4]. A chaque fois, l’extorsion d’aveux et les tortures à leur encontre ont été établies. Pour autant, les enquêtes et les poursuites pénales des auteurs présumés restent au point mort. »

La situation reste critique pour ceux qui défendent les victimes de tortures. En dépit de l’adoption d’un mécanisme de protection des défenseurs des droits de l’homme en 2011, les autorités ne remplissent pas leur obligation de les protéger, notamment en enquêtant sur les attaques à leur encontre. En 2013, 427 agressions contre des défenseurs des droits de l’homme ont été recensées.

Les autorités mexicaines doivent reconnaître l’ampleur du phénomène. Elles doivent veiller à ce que les auteurs de tortures et les agents d’État qui négligent l’enregistrement des plaintes, les enquêtes et les poursuites pénales pour tortures soient jugés et sanctionnés. Les condamnations pour tortures doivent être rendues publiques à titre d’exemple et aux fins de prévention.

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Notes aux rédactions :

Ce communiqué peut être consulté en version espagnole en suivant ce lien.

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