Coupe du Monde Qatar 2022 : pourquoi il ne faut pas se taire !
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La désignation du Qatar pour accueillir la Coupe du Monde de football masculin 2022 a déjà soulevé beaucoup de réactions et d’indignation à travers le monde en raison des drames humains qu’elle a entraînés pour des centaines de milliers de migrants venus construire des stades et infrastructures spécialement conçus pour cette compétition sportive : des conditions de travail non sécurisées générant de nombreux accidents non suivis de soins ni dédommagés, des salaires impayés, des heures de travail jusqu’à épuisement, des familles entières plongées dans le plus grand dénuement, des pères, frères ou fils décédés dans l’anonymat. Une situation que l’on retrouve malheureusement dans de nombreux pays de la péninsule arabique. Selon différentes sources, on compte plusieurs milliers de morts sur ces différents chantiers.
L’impact environnemental de cette Coupe du Monde est également majeur, avec l’installation de stades climatisés en plein désert, de multiples navettes aériennes avec ses pays voisins, et autres sources de pollution, de consommation énergétique abyssale, à l’heure où la communauté internationale se voit rappelée à l’ordre par la nature et ses catastrophes en série. Sans parler des différents scandales financiers et de corruptions, portant notamment sur l’attribution même de la Coupe du Monde.
L’ACAT-France se doit également d’alerter et de mobiliser l’opinion sur une autre conséquence dramatique sur les droits humains, de cette Coupe du Monde au Qatar : celui de la disparition de l’espace civique[1] par la répression. En effet, nous avons noté une multiplication des attaques par les autorités qataries au cours des trois dernières années, à l’encontre de personnes exerçant leur liberté d’expression, ainsi que leur droit d’association et de manifestation.
Cette répression s’exerce aussi bien contre des travailleurs étrangers que des citoyens qataris. À plusieurs occasions, des travailleurs étrangers s’exprimant sur leurs conditions de travail ou manifestant pour obtenir leurs arriérés de salaire ont été arrêtés, détenus arbitrairement avant d’être expulsés. Par ailleurs, des défenseurs des droits humains et militants qataris pro-démocratie ont été arrêtés et certains condamnés à de longues peines pour avoir exprimé leurs opinions sur les réseaux sociaux ou manifesté pacifiquement pour les défendre.
Le Qatar, loin en effet d’être une démocratie, est une monarchie absolue dont l’émir Tamim ben Hamad Al Thani est le chef de l’État. La famille princière Al Thani contrôle le pouvoir, les partis politiques sont tout simplement interdits, et il n’existe qu’un semblant de parlement, le Conseil de la Shura, qui n’a qu’un pouvoir limité et consultatif et dont le mode de désignation est lui-même sujet à controverse. En plus de ses ressources gazières importantes, le Qatar mise beaucoup sur son soft-power que cela soit via les médias de masse, comme le réseau Al-Jazeera, ou en matière de sport (le réseau de chaines sportives BeIN sport, le rachat du PSG…) et pour lequel la Coupe du Monde de football masculin est une sorte de consécration de son influence mondiale. Par cette stratégie, le Qatar cherche à diffuser mondialement une image progressiste et moderne pour mieux gommer ses pratiques autoritaires et conservatrices. Une technique également appelée sportswashing qui est devenu une pratique récurrente dans la région avec l’Arabie saoudite et Bahreïn, deux autres pays souvent dénoncés par les ONG et régulièrement mis en cause par l’ACAT-France dans des cas de torture et pour leurs violations massives des droits humains.
Trop souvent ces grands évènements sportifs, et tout particulièrement avec la Coupe du Monde de football et les Jeux olympiques, sont utilisés par des régimes peu respectueux des droits humains pour redorer leur image à travers le monde.
En attendant que les instances sportives internationales prennent sérieusement en considération la question des droits humains dans l’attribution de ses évènements mondiaux, l’ACAT-France appelle à ne pas jouer le jeu de ces régimes qui bafouent quotidiennement la dignité humaine, en boycottant la Coupe du Monde 2022.
Contact presse :
Louis Linel, chargé de communication et plaidoyer
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[1] L’espace civique est un ensemble de conditions juridiques, politiques, institutionnelles et pratiques nécessaires aux acteurs non gouvernementaux pour accéder à l’information, s’exprimer, s’associer, s’organiser et participer à la vie publique (Définition de l’Observatoire de l’espace civique de l’OCDE).