Maroc
Appel urgent

Le défenseur Maati Monjib arrêté et détenu arbitrairement

Alors qu’il déjeunait le 29 décembre avec son ami journaliste et militant Abdellatif El Hamamouchi dans un restaurant du quartier Hassan à Rabat, huit policiers en civil descendus de deux voitures ont arrêté Maati Monjib et l’ont immédiatement embarqué, et cela sans qu’aucun mandat ne lui soit présenté ni qu’une convocation judiciaire lui ait été antérieurement notifiée.
Maati Monjib 3
Maati Monjib (copie d'écran vidéo Radouane El Baroudi).
Le 13 / 01 / 2021

Alors qu’il déjeunait le 29 décembre avec son ami journaliste et militant Abdellatif El Hamamouchi dans un restaurant du quartier Hassan à Rabat, huit policiers en civil descendus de deux voitures ont arrêté Maati Monjib et l’ont immédiatement embarqué, et cela sans qu’aucun mandat ne lui soit présenté ni qu’une convocation judiciaire lui ait été antérieurement notifiée.

Le lendemain, le procureur du roi auprès du tribunal de première instance de Rabat a annoncé par voie de communiqué que Maati avait été placé en détention provisoire pour « blanchiment d’argent ». Il est depuis détenu à la prison d’El Arjat à proximité de Rabat en attendant d’être à nouveau entendu par le juge d’instruction le 20 janvier 2021. Depuis son arrestation, Maâti a pu avoir accès à ses avocats mais n’a pu voir sa famille en raison des nouvelles règles sanitaires adoptées dans le contexte de la pandémie de la Covid-19.

Cette arrestation fait suite à une enquête pour « blanchiment de capitaux » ouverte contre lui et des membres de sa famille par le parquet du Tribunal de première instance de Rabat le 7 octobre 2020. Ces accusations montées de toutes pièces marquaient une nouvelle escalade dans le harcèlement judiciaire que connait Maati Monjib depuis 2015 suite à une première affaire dans laquelle il est poursuivi pour « atteinte à la sécurité de l’État ».

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CONTEXTE

Décrit comme la bête noire voire l’ennemi public n°1 par certaines officines du régime marocain, Maati Monjib, est un universitaire spécialisé sur l’histoire politique du Maroc qui exerce également comme journaliste et défenseur des droits humains. Il est également le fondateur du Centre Ibn Rochd d'Etudes et de Communication de Rabat (Maroc), membre et cofondateur de l'Association marocaine pour un journalisme d'investigation (AMJI), et aussi président de l’association « Freedom now », dont le but est de protéger la liberté d’opinion et la liberté de presse au Maroc.

C’est un commentateur régulier de la politique marocaine dans les médias internationaux, dans des groupes de réflexion et des forums universitaires. Il y exprime sans détour ni réserve ses positions et analyses sur les violations des droits humains et le fonctionnement opaque et cleptocratique du makhzen (le pouvoir royal avec ses cercles d’influences et de clientélisme). Lors d’un dernier séjour en France en septembre 2020, il a été interviewé par plusieurs médias. Lors d’un entretien avec RFI, il a notamment pointé le « rôle de la Direction générale de la surveillance du territoire (les renseignements intérieurs marocains) dans la répression des opposants et la gestion des affaires politiques et médiatiques au Maroc », ce qui lui aurait valu cette nouvelle poursuite initiée le 7 octobre 2020. Le régime lui en veut également d’avoir participer au rapprochement entre des islamistes et des militants de gauche laïque dans leur combat commun pour plus de droits et de démocratie au Maroc.

Un harcèlement judiciaire, sécuritaire et médiatique incessant

Depuis 2015, Maati Monjib fait l’objet de harcèlement judiciaire, sécuritaire et médiatique. Une première affaire l’accuse « d’atteinte à la sécurité de l’État » en raison d’activités de formations au journalisme d’investigation et à la protection contre le cyber espionnage mené par l’AMJI et le Centre Ibn Rushd avec le soutien de l’ONG néerlandaise Free Press Unlimited. Pour cette affaire, il a dû se rendre à 21 audiences du tribunal de première instance de Rabat qui se sont systématiquement soldées par un report du procès au bout de quelques minutes seulement.

Il lui est interdit d’enseigner et d’intervenir publiquement même dans le cadre de ses fonctions d’universitaire depuis 2015. Il lui a également été interdit de quitter le territoire, ce à quoi il a protesté par une grève de la faim de 3 semaines. La mesure a finalement été levée en raison de la mobilisation nationale et internationale qu’elle a entraînée. Depuis cette date, le régime utilise d’autres méthodes de harcèlements plus insidieuses : ses déplacements au Maroc comme à l’étranger font l’objet d’une surveillance étroite et visible, et la presse au service du régime, comme les sites le360 ou Chouf TV, enchaînent les articles diffamatoires pour salir son image.

Comme l’illustrent les motifs de son arrestation, le régime utilise désormais des accusations de droit commun, infamantes, destinées à salir les personnes visées et ainsi leur nier le statut de victime politique. Les journalistes Taoufik Bouachrine, Omar Radi, Hajar Raissouni et Soulaimane Raissouni ont été poursuivies dans des affaires de mœurs, de viol ou de corruption. Selon Amnesty International en 2019, Maati Monjib a également fait l’objet de cybersurveillance par les autorités marocaines par le biais du logiciel espion Pegasus de la société israélienne NSO Group, outil très prisé par les régimes autoritaires dans le monde.

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