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Une justice en demi-teinte dans l’affaire «Chacona»

La Cour d’appel de Brazzaville tarde à examiner le recours contre le jugement ayant condamné six policiers dans l’affaire « Chacona ». L’appel, déposé par les avocats des victimes en mars 2019, aurait dû être traité dans un laps de temps de trois mois. Six mois sont déjà passés et la Cour d’appel reste silencieuse.
Congo Procès Chacona

La Cour d’appel de Brazzaville tarde à examiner le recours contre le jugement ayant condamné six policiers dans l’affaire « Chacona ». L’appel, déposé par les avocats des victimes en mars 2019, aurait dû être traité dans un laps de temps de trois mois. Six mois sont déjà passés et la Cour d’appel reste silencieuse.

 

Le 8 mars 2019, à l’issue d’une enquête bâclée, la 3ème chambre correctionnelle du Tribunal de grande instance de Brazzaville condamne six policiers – dont un commissaire (deux ans de prison ferme) et son adjoint (trois ans de prison ferme) – accusés « d’homicide involontaire et de non-assistance à personne en danger » dans l’affaire de treize jeunes hommes décédés en juillet 2018 dans le commissariat de police de Chacona à Brazzaville des suites d’actes de torture.  

Aucun supérieur hiérarchique n’est sanctionné laissant penser que ce drame était de la seule responsabilité de quelques policiers agissant en dehors des règles établies. Or, les arrestations de ces jeunes hommes ont été réalisées dans le cadre d’une opération officielle de police de lutte contre le banditisme ayant mobilisé près d’une centaine de policiers. 

Concernant les indemnités des ayants-droits, bien que l’Etat ait été reconnu civilement responsable dans cette affaire, la Cour se déclare incompétente, jugeant que « la faute est non détachable de l’administration ».

Les familles de victimes ont donc été privées du droit à la réparation pour le préjudice subi et obtenu une justice en demi-teinte avec la seule condamnation de six policiers.

 

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CONTEXTE

 

 Entre le 21 et le 23 juillet 2018, la police congolaise déploie près d’une centaine de policiers pour « traquer les bandits » dans les quartiers nord de Brazzaville.

Au mépris de la législation encadrant les interpellations, la police procède à une campagne d’arrestations sans fondement et de manière arbitraire. Une vingtaine de jeunes hommes sont interpellés puis envoyés au Commissariat de Chacona à Mpila. Dans la nuit du 22 au 23 juillet, officiellement treize jeunes hommes[1] décèdent des suites d’actes de torture et de traitements cruels inhumains et dégradants.

Le 23 juillet au matin, dans le but de cacher les corps aux familles, les cadavres sont déposés dans trois morgues de Brazzaville sous de fausses identités. Les autorités congolaises essaient ensuite de maquiller ces meurtres en décès survenus à la suite d’affrontements entre bandes de criminels. Mais les enquêtes menées par l’Observatoire Congolais des Droits de l'Homme (OCDH) montrent que la responsabilité des policiers est engagée dans cette affaire.

Le 26 juillet, lors d’un débat au Parlement, le ministre de l’Intérieur, Raymond-Zéphirin Mboulou, reconnait finalement la mort de ces treize jeunes pendant leur garde à vue, et indique qu’une commission d’enquête administrative et judiciaire a été mise en place. Les familles de victimes reçoivent des frais d’enterrement de 2 000 000 de Francs CFA (environ 3 000 euros) de la part des autorités congolaises en échange de l’enterrement expéditif des victimes.

A la suite d’une enquête expéditive, menée exclusivement par la police congolaise (enquête pendant laquelle aucune autopsie des corps des victimes n’est pratiquée malgré les réclamations de plusieurs associations de défense des droits de l’homme et qui ne s’est focalisée que sur les agissements des agents en poste au commissariat de Chacona au moment des faits, sans faire la lumière sur la chaîne de commandements ayant entraîné ce drame), le parquet du tribunal de grande instance de Brazzaville ouvre une information judiciaire contre seulement six policiers pour « homicide involontaire et non-assistance à personne en danger ». Les six policiers sont mis aux arrêts.  Le 25 octobre 2018, leur procès débute devant la troisième chambre correctionnelle de la cour d’appel de Brazzaville. Le 8 mars 2019, ils sont condamnés à des peines de prison. Aucun supérieur hiérarchique, ni autorité n’est sanctionné. L’Etat est reconnu civilement responsable dans cette affaire, mais la Cour n’accorde toutefois aucune réparation aux familles de victimes.

 

[1] Ndombi Gersi Roldi (20 ans), Tolly Oya Harmony Gabriel (23 ans), Nkouka Orchidée (20 ans), arrêtés le 21 juillet 2018 ; Aba Wilfried (21 ans) arrêté le 22 juillet 2018 ; Mananga Stephen (16 ans), arrêté le 21 juillet 2018 ; Tedechy Gédéon Mpayouli (20 ans), arrêté le 21 juillet 2018 ; Kiyindou Chance (20 ans), arrêté le 21 juillet 2018 ; Moukpokpo Urbain Durbagne (18 ans), Aka Grâce (23 ans), arrêtés le 21 juillet 2018 ; Anga Jérémie (16 ans) ; Oba John (19 ans) ; Itoua Grâce Héritier (28 ans) ; inconnu.

 

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