Un Français victime de crimes de guerre
Lorsqu’il a été arrêté, Salah Hamouri s’apprêtait à se rendre en France pour voir son fils d’un an et demi et son épouse Elsa, interdite d’entrée en Israël depuis deux ans. Le mois suivant, il devait prêter serment pour devenir avocat. Autant de projets poursuivis de longue lutte malgré le harcèlement permanent exercé par les autorités militaires israéliennes depuis sa première détention à 16 ans en 2001. Détenu à nouveau pendant cinq mois en 2004, il avait été condamné à sept ans d’emprisonnement l’année suivante, à l’issue d’un procès inéquitable, pour avoir prétendument fomenté l’assassinat d’un rabbin. Libéré en 2011 dans le cadre de l’« accord Shalit », il avait depuis rejoint l’ONG de défense des droits de l’homme Addameer en tant qu’enquêteur de terrain. Il avait en outre réussi à passer des diplômes de droit et à fonder une famille avec son épouse française, malgré les nombreuses entraves posées par Israël pour l’empêcher de mener une vie personnelle et professionnelle normale.
Salah Hamouri est à présent de retour en prison, sans savoir pourquoi. Le 27 août 2017, il a été placé en détention administrative pour une période de six mois renouvelable indéfiniment au motif qu’il constituerait une menace pour la sécurité d’Israël. Sans inculpation ni procès, il est détenu sur la base d’informations secrètes. Il ne peut sérieusement contester sa détention en justice à défaut d’accès à son dossier, ce qui est une violation manifeste des droits de la défense. Il est en outre incarcéré dans la prison de Megiddo, en Israël et non en territoire palestinien comme cela devrait être le cas.
Pour ces raisons, Salah Hamouri est victime de crimes de guerre. Un crime de guerre ne réside en effet pas que dans le bombardement de populations civiles. Les Conventions de Genève, le Statut de Rome instituant la Cour pénale internationale et le droit pénal français sont clairs : faire obstacle, dans le cadre d’un conflit armé, au droit d’une personne d’être jugée régulièrement et impartialement est un crime de guerre.
De même, transférer une partie de la population civile d’un territoire occupé – même une seule personne – en dehors de ce territoire est aussi un crime de guerre.
Ce faisant, la détention arbitraire de Salah Hamouri et son incarcération sur le territoire israélien sont à double titre des crimes de guerre passibles de peines d’emprisonnement pouvant aller jusqu’à la réclusion criminelle à perpétuité selon le droit pénal français.
Le sort de Salah Hamouri est commun à des milliers d’autres détenus Palestiniens, eux aussi victimes de crimes de guerre pour la plupart, en toute impunité. Cependant, Salah Hamouri est aussi français et devrait à ce titre bénéficier de la protection effective de la France qui revendique sa volonté de prévenir et lutter contre l’impunité des violations graves des droits de l’homme et du droit international humanitaire.
Les autorités françaises ne peuvent demeurer silencieuses face à la perpétration continue de crimes de guerre à l’encontre d’un de leurs citoyens. Elles doivent exiger d’Israël la cessation immédiate de ces violations.
Contexte
La détention comme outil de contrôle de la société palestinienne
Au nom de sa sécurité, Israël utilise la prison comme un véritable outil de pression/répression visant à contrôler la société palestinienne.
Depuis 1967, plus de 850 000 Palestiniens ont été emprisonnés par les autorités israéliennes, soit 20% de la population totale et 40% de la population masculine. Parmi eux, des hommes, femmes, enfants, journalistes, universitaires, parlementaires, etc.
Chaque famille palestinienne a connu la détention d’au moins un de ses membres. Tous ont subi un parcours jalonné de violences, d’humiliations et d’injustices qui produisent des effets dramatiques à long terme sur la société palestinienne et sur le processus de paix, voué à l’impasse tant que la question des prisonniers palestiniens ne sera pas réglée.
Selon l’ONG palestinienne Addameer, 6154 Palestiniens sont actuellement détenus dans des prisons israéliennes, parmi lesquels 259 enfants, 59 femmes et 11 députés. 520 prisonniers purgent une peine d’emprisonnement à vie.
Des violations répétées du droit international humanitaire
Les conditions de détention des Palestiniens sont extrêmement dures et impliquent un large éventail de violations du droit international : torture, transferts de prisons à prisons dans des conditions inhumaines, détention administrative, isolement, interdiction de visites, absence de traitements médicaux... La plupart des prisonniers palestiniens sont détenus sur le territoire israélien, en violation du droit international humanitaire.
463 Palestiniens sont actuellement en détention administrative. Selon la Quatrième Convention de Genève, la détention administrative doit demeurer une mesure exceptionnelle, « absolument nécessaire » et justifiée par « d’impérieuses raisons de sécurité ». La détention administrative telle que prévue et appliquée par Israël est donc une violation manifeste du droit international humanitaire qui a été dénoncée par plusieurs autorités des Nations unies et notamment par le Comité contre la torture et l’Office pour la coordination des affaires humanitaires dans les Territoires palestiniens occupés.