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Trois jeunes syndicalistes risquent la torture

Pour avoir défendu les droits d’ouvriers atteints de silicose, Wei Zhili et deux de ses collègues ont été placés en « résidence surveillée dans un endroit désigné », une forme très décriée de détention qui accorde à la police une autorité démesurée pour recourir à la torture.
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Le 19 avril 2019, Wei Zhili (危志立) a officiellement été placé en « résidence surveillée dans un endroit désigné », un procédé légal en Chine permettant de détenir quelqu’un au secret pendant six mois sans aucune supervision sur son état. A cette annonce, son épouse, la militante féministe Zheng Churan (郑楚然) s’est inquiétée du risque de torture, à l’aune des nombreux témoignages d’anciens prisonniers faisant état de tabassages et de privations de sommeil.

Un mois plus tôt, Wei Zhili avait été arrêté en pleine nuit au domicile de ses parents à Canton, dans le Sud du pays. La police de Shenzhen avait indiqué à sa famille qu’il était suspecté de « trouble à l’ordre public ».

Âgé de 30 ans, ce petit-fils d’ouvrier est engagé dans la défense des travailleurs originaires du Hunan ayant contracté des maladies pulmonaires dues à l’inhalation de particules sur des chantiers de la métropole de Shenzhen. Il les accompagne dans leurs demandes de dédommagement. Wei Zhili est aussi l’un des rédacteurs de « Nouvelle Génération » (新生代), un site Internet qui rend compte de la situation des travailleurs migrants internes venus des régions rurales de Chine.

Deux autres activistes écrivant pour « Nouvelle Génération » sont également détenus. Ke Chengbing (柯成冰), âgé de 29 ans, a été arrêté le 20 mars sans qu’aucune information ne soit communiquée à sa famille et placé en « résidence surveillée dans un endroit désigné » le même jour que Wei Zhili. Yang Zhengjun (杨郑君), 33 ans, avait quant à lui été arrêté le 8 janvier 2019 et se trouve lui aussi détenu au secret et à risque de torture.

 

Vous voulez soutenir Wei Zhili, Ke Chengbing et  Yang Zhengjun ?

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Contexte

La résidence surveillée dans un endroit désigné : un « permis de torturer » pour la police

Adopté en 2012, le placement en « résidence surveillée dans un endroit désigné » est une disposition légale qui permet de détenir un suspect au secret  dans un lieu indéterminé sans contact avec l’extérieur pendant une durée pouvant aller jusqu’à six mois, en dehors de toute institution officielle. Dans ce cadre, il existe un fort risque de torture et de mauvais traitements. Ce procédé légal a été copieusement utilisé à l’encontre d’avocats et de défenseurs des droits humains ces dernières années. Ceux qui en sont sortis ont témoigné des sévices subis pour leur soutirer des confessions en amont de leur procès. L’avocat Xie Yang a ainsi été forcé à rester assis plus de vingt heures par jour sur des tabourets en plastique empilés, les jambes pendantes. Ses interrogateurs l’avaient prévenu que le moindre mouvement de sa part sans leur autorisation serait considéré comme une « attaque contre la police ». Il a également été tabassé.

Lorsque parler pour les travailleurs devient « anticommuniste »

Ces détentions sont le dernier exemple en date de la répression accrue du gouvernement contre le mouvement syndical naissant dans le pays. Depuis juillet 2018, les autorités chinoises ont arrêté arbitrairement et interrogé des dizaines de responsables de mouvements étudiants, de défenseurs des droits des travailleurs et d'employés d’usines à travers le pays. Wei Zhili avait déjà été menacé par la police, qui lui avait indiqué que le militantisme syndical « troubl[ait] l'ordre social » et que « parler pour les travailleurs [était] anticommuniste et contre-révolutionnaire ».

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