Sorti de prison, Jiang Tianyong est loin d’être libre
Jiang Tianyong, qui devait être libéré le 28 février 2019 après avoir purgé une peine de deux ans de prison pour « subversion », a disparu avant que ses proches ne puissent venir le chercher à sa sortie. Selon les gardes de la prison n°2 de Xinxiang, Jiang Tianyong était déjà parti. Initialement, les autorités chinoises informent sa famille que ce dernier serait emmené à Zhengzhou, où le gouvernement se chargerait de lui trouver un emploi, mais qu’il ne serait pas autorisé à rentrer chez lui. En parallèle, le père et la sœur de Jiang Tianyong, qui avaient prévu de le rejoindre à sa sortie de prison, étaient également injoignables depuis le 27 février. Selon l’épouse de l’avocat, exilée aux Etats-Unis, leurs téléphones étaient éteints.
Après trois jours d’attente fébrile, Jiang Tianyong, son père et sa sœur réapparaissent finalement le 2 mars 2019 au domicile familial à Xinyang, dans la province du Henan. L’avocat a alors pu passer un appel vidéo à son épouse Jin Bianling et sa fille, le premier depuis que ces dernières ont fui la Chine pour Los Angeles en 2013. Lors de l’appel, Jiang Tianyong a demandé à ce que l'on transmette ses remerciements à tous ceux qui l’ont soutenu. « Il n’a pas pu en dire beaucoup, car il n’est toujours pas libre » regrette son épouse, qui espère que la communauté internationale restera vigilante au sort de son mari.
Bien qu’il ait purgé l’intégralité de sa peine, Jiang Tianyong est privé de ses droits politiques et demeure sous haute surveillance. Des policiers stationnent à l’extérieur de la maison de ses parents et le suivent à chacune de ses sorties.
S’il est encore difficile à l’heure actuelle de connaître son état de santé, son épouse l’a trouvé amaigri, et sa vue semble s’être détériorée. Lors de sa détention, Jiang Tianyong s’était également mis à souffrir de pertes de mémoire, ce qui laissait craindre qu’il n’ait été forcé d’ingurgiter des médicaments psychoactifs.
Cible du régime depuis des années
Jiang Tianyong est l’un des nombreux avocats des droits humains ciblés par la « répression 709 » -- à l’instar de Xie Yang, Wang Quanzhang ou encore Yu Wensheng. Familier des arrestations arbitraires depuis des années, Jiang Tianyong avait été radié du barreau en 2009 mais continuait de défendre et soutenir publiquement les groupes les plus marginalisés de la société chinoise, tels que des pratiquants de Falun Gong ou des personnes porteuses du VIH/SIDA.
Le 21 novembre 2016, il avait été enlevé par les autorités alors qu’il venait de rendre visite à l’épouse de son confrère Xie Yang, à l’époque emprisonné. Il avait alors passé de longs mois en « résidence surveillée » dans un lieu tenu secret, sans contact avec sa famille. Suspecté d’avoir incité à la « subversion du pouvoir d’État », Jiang Tianyong avait finalement été jugé le 22 août 2017 lors d’un procès expédié en quelques heures, à huis clos, et condamné à deux ans de prison suite à des aveux obtenus sous la torture.