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Une victime de torture risque d'être condamnée

Détenu au secret et torturé pendant 20 jours aux mains du Département du renseignement et de la sûreté (DRS) en 2009, Medjdoub Chani risque aujourd’hui d’être condamné à l’issue d’un procès inéquitable.
M. Chani_photo

Détenu au secret et torturé pendant 20 jours aux mains du Département du renseignement et de la sûreté (DRS) en 2009, Medjdoub Chani risque aujourd’hui d’être condamné à l’issue d’un procès inéquitable.

Le 17 septembre 2009, cet homme d’affaire algéro-luxembourgeois a été enlevé dans la rue par des agents en civil, alors qu’il venait d’arriver à Alger pour y passer l’Aïd avec sa famille. Pendant que son épouse et son fils, résidents au Luxembourg, essayaient en vain de le retrouver, M. Chani était détenu dans un centre secret et soumis à des coups, des privations de sommeil et de nourriture ainsi que des humiliations pour lui faire signer des aveux dans lesquels il s’accusait de corruption. Le 6 octobre suivant, il a été présenté au milieu de la nuit devant un juge d’instruction qui l’a placé en détention provisoire.

Après deux ans de détention arbitraire et malgré les risques de rétorsion, M. Chani a fini par porter plainte pour torture. Une plainte classée sans suite quelques jours plus tard, sans enquête. Ses avocats ont alors porté plainte au Luxembourg mais l’enquête piétine en raison de l’absence de coopération de la justice algérienne.

Ce n’est que le 6 juin 2012, après près trois ans de détention provisoire, que M. Chani a finalement été jugé et condamné à 18 ans d’emprisonnement, une peine réduite à 15 ans en appel. Il est aujourd’hui poursuivi dans une deuxième affaire dans laquelle son procès débutera le 19 avril. Il risque d’être condamné sur la base d’aveux signés sous la torture.

Contexte

Il est très difficile d’obtenir des témoignages de victimes de torture en Algérie. Elles sont peu enclines à dénoncer les sévices ou mauvais traitements subis, par manque de confiance en la justice et surtout par peur d’être à nouveau torturées ou condamnées à une lourde peine en cas de poursuite judiciaire.

Les agents du DRS sont parmi les principaux auteurs d’actes de torture et de mauvais traitements. Créé en 1990, le DRS est tristement célèbre pour les exactions massives perpétrées pendant la guerre civile et représente actuellement le seul service habilité à instruire les affaires de terrorisme. Ses agents, officiellement pourvus des prérogatives de la police judiciaire, échappent en pratique au contrôle du procureur de la République. De même, les centres de détention non reconnus dans lesquels ils se livrent aux interrogatoires et aux violences ne sont pas inspectés par ce dernier.

Les poursuites à l’encontre d’agents de l’État se rendant coupables d’actes de torture sont rares et ne concernent jamais les membres du DRS. C’est ainsi que Mohammed Médiene, chef du DRS et responsable à ce titre de la principale institution tortionnaire du pays, occupe toujours le même poste depuis 1990.

Toutefois, en 2013, le président Bouteflika a entamé une réforme du DRS, vraisemblablement pour réduire son influence politique. Il n’est pas certain que le pouvoir d’influence du Département en ait pour le moment sérieusement pâti.

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