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Tunisie
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Les tortionnaires de Rached Jaïdane échappent à la justice

Au lendemain de la révolution, Rached Jaïdane a porté plainte pour les tortures subies au cours de sa détention au secret en 1993. Après des années de procès, ses tortionnaires ont été soustraits à la justice.
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Arrêté en 1993 pour ses liens présumés avec le mouvement islamiste Ennahda, Rached Jaïdane a été détenu au secret et torturé par la sûreté de l’État. Il a porté plainte pour torture après la révolution et s’est trouvé confronté aux rouages d’une justice délibérément dysfonctionnelle.

L’enquête pour torture a été bâclée : le témoin principal n’a pas été interrogé et les alibis des mis en cause n’ont pas été vérifiés.

Le juge d’instruction a choisi de qualifier les faits de simple délit de violence au motif que le crime de torture n’a été intégré dans le Code pénal qu’en 1999 et qu’il n’est pas applicable rétroactivement. Cependant, le juge aurait tout de même pu qualifier les faits de crimes de séquestration et de crime de violence passibles de peines à la hauteur de la gravité des faits.

Finalement, après plus de trois ans de procès marqué par des reports d’audiences dilatoires, les juges ont définitivement achevé l’espoir de justice de Rached Jaïdane en considérant les faits prescrits. Pourtant, après la révolution, les gouvernements transitoires s’étaient engagés à ne pas faire jouer la prescription dans les cas de torture passés au motif qu’il était impossible d’obtenir justice à l’époque de Ben Ali.

La décision rendue dans l’affaire de Rached Jaïdane constitue un revirement jurisprudentiel qui sonne le glas de la justice transitionnelle en refermant la chape de plomb sur les crimes passés. L'avocate de Rached Jaïdane a fait appel du jugement et vient de subir de sérieuses menaces. L'appel sera examiné le 3 novembre prochain.

Contexte

La torture, un fléau persistant

Le cauchemar subi par Rached Jaïdane est emblématique du phénomène tortionnaire tunisien qui perdure aujourd’hui encore. La torture est fréquemment employée à l’encontre de victimes aux profils divers : personnes soupçonnées d’avoir un lien avec des activités terroristes, personnes soupçonnées d’infractions de droit commun, mais aussi rappeurs, blogueurs et jeunes activistes considérés comme tenant des discours hostiles au gouvernement. Ces dernières années, plusieurs suspects de droit commun sont morts dans des postes de police dans des circonstances suspectes.

L’impunité, encore et toujours

Le processus vers la sanction et la réparation du crime de torture est parsemé d’obstacles souvent insurmontables. Certains tiennent à un manque de diligence des magistrats, d’autres à leur iniquité. Certains résultent d’un encombrement de la justice, d’autres des nombreuses entraves posées par les agents des forces de sécurité qui refusent de collaborer aux enquêtes et parfois menacent les victimes et les témoins. Il résulte de tout cela qu’à ce jour, aucune plainte n’a donné lieu à un procès satisfaisant fondé sur une enquête diligente.

Dans la très grande majorité des cas, si la victime a la chance d’obtenir l’ouverture d’une enquête, cette dernière ne se matérialise qu’à travers un ou deux actes suivis d’un abandon de facto.

Pour en savoir plus sur la torture et l’impunité en Tunisie

 


 

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  • Justice et impunité