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Justice pour Wang Meiyu, décédé dans les geôles chinoises

Le 23 septembre 2019, le militant pro-démocratie Wang Meiyu a été déclaré mort dans un hôpital militaire de la province du Hunan, deux mois à peine après son arrestation pour avoir demandé la démission de Xi Jinping. Interpellons les autorités chinoises pour que sa mort ne reste pas impunie !
wangmeiyu

L’épouse de Wang Meiyu (王美余), Cao Shuxia (曹曙霞), a reçu le 23 septembre 2019 un appel de la police lui annonçant la mort de son mari à l’hôpital militaire de Hengyang, sans qu’aucune explication sur les causes de son décès ne lui soit fournie.

Cao Shuxia, qui a été autorisée à voir le corps de son mari, a constaté que ses yeux, sa bouche, son nez et ses oreilles avaient saigné, et que son visage était constellé de bleus. Cao Shuxia aurait par la suite subi des pressions pour valider le communiqué de la police selon laquelle la mort de Wang Meiyu était « accidentelle », ce qu’elle a refusé. La famille de Meiyu, y compris ses deux jeunes enfants, a été placée sous résidence surveillée durant plusieurs jours. Le téléphone de son épouse a été coupé. D’autres personnes liées à l’affaire ont également été intimidées. Le 25 septembre, la police a détenu durant plusieurs heures l’avocat des droits humains Xie Yang (謝陽) et l’activiste Chen Yanhui, qui s’étaient donnés rendez-vous dans un hôtel pour parler de la mort de Wang Meiyu. La mère de Wang Meiyu a ensuite indiqué que sa famille avait reçu une compensation financière d’une valeur de plus de 2 millions de yuan (environ 255 000 euros).

Wang Meiyu, âgé de 38 ans, avait été arrêté le 8 juillet dernier, dans le cadre du renforcement de la répression menée en amont des célébrations du 70e anniversaire du Parti communiste chinoise (PCC) le 1er octobre 2019. Il avait par la suite été mis en accusation pour « avoir cherché querelle et provoqué des troubles » -- une provision vague du Code pénal utilisée de façon routinière pour condamner des défenseurs des droits humains. Cette arrestation faisait suite à une action menée en 2018, au cours de laquelle il avait tenu une pancarte appelant à la démission du Président Xi Jinping et de son premier ministre Li Keqiang et à la mise en place du suffrage universel devant le commissariat provincial de police du Hunan.

Wang Meiyu était devenu activiste à la suite de la destruction forcée de sa maison. Pour s’être exprimé de manière libre sur les réseaux sociaux, il avait brièvement été détenu en juillet 2018 et avait subi des actes de torture par privations d’eau et utilisation d’aiguilles électriques.

 

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CONTEXTE

Xi Jinping, un nouveau timonier ?

Depuis qu’il a été nommé Président par les délégués du Parti communiste chinois (PCC) en novembre 2012, Xi Jinping est mû par une ambition le distinguant de ses prédécesseurs ainsi qu’une volonté de fer d’étendre son empire et d’écraser toute velléité de dissidence au sein de la population. La répression contre la société civile s’est intensifiée et le gouvernement restreint chaque jour davantage les droits et les libertés fondamentales de ses citoyens. Ces dérives autoritaires ont fait de la Chine une véritable prison à ciel ouvert. Derrière les barreaux, si la torture et les traitements cruels, inhumains ou dégradants touchent toute personne soupçonnée d’avoir commis une infraction pénale, les risques sont encore plus élevés lorsque les détenus sont considérés comme « sensibles » : défenseurs des droits humains, avocats, journalistes, voix critiques du régime, communautés religieuses et minorités ethniques, en particulier les Tibétains et les Ouïghours. Xi Jinping s’est en outre offert en mars 2018 la possibilité d’un « mandat à vie » en faisant voter au Parlement l’abolition de la limite des mandats présidentiels dans la Constitution chinoise.

Des peines de prison qui se transforment en peines de mort

Ces dernières années, au moins cinq défenseurs des droits humains sont décédés en détention ou très peu de temps après avoir obtenu une libération conditionnelle pour raisons médicales. Dans chaque cas, les circonstances sont troubles et les enquêtes inexistantes. La communauté internationale est brutalement rappelée à cette sinistre réalité chinoise lorsque le lauréat 2010 du prix Nobel de la paix, Liu Xiaobo, décède le 12 juillet 2017, après avoir été extrait in extremis de sa cellule pour une chambre sous haute surveillance de l’hôpital de Shenyang. Depuis, le défenseur des droits culturels des Ouïghours Muhammed Salih Hajim est décédé en détention au Xinjing dans des circonstances floues en janvier 2018. Un éminent avocat des droits humains, Ji Sizun, est mort le 10 juillet dernier après quatre ans et demi de prison, dont il était sorti dans un état semi-comateux deux mois auparavant. Les familles n’ont jamais pu obtenir justice, bloquées par le silence imposé des autorités et la soumission totale de la justice chinoise aux ordres de l’exécutif. Dans ce cadre règne une véritable impunité d’Etat.

Pour en savoir plus, lire l’article de l’ACAT paru dans notre magazine Humains n°11 « Chine : la prison tue ».

Harcèlement des proches et des soutiens

Ça n’est pas la première fois que les autorités s’en prennent à la famille d’un défenseur ; cela fait même partie de leurs tactiques d’intimidation et de dissuasion. La mère du journaliste Huang Qi (黄琦), âgée de 85 ans, a été enlevée par la police en décembre 2018 et est depuis assignée à résidence. Suite à l’arrestation de l’avocat Yu Wensheng (余文生), son épouse Xu Yan (许艳) a été interrogée par la police, menacée d’être elle aussi poursuivie en justice pour subversion et placée sous haute surveillance. La famille de l’avocat des droits humains Wang Quanzhang (王全璋) subit également toutes sortes de pressions : éviction de leur appartement, assignation à résidence, surveillance constante de leur domicile par des agents de police, entraves à l’inscription de leur jeune fils à l’école…

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