Condamnées à mort au Cameroun : je soutiens Kilanta, Martha, Marie et Damaris
Condamnées à mort pour espionnage
Elles avaient quitté le Cameroun pour être employées de maison au Nigéria. Les histoires de Kilanta Dagora, Martha Wetaya, Marie Dawandala et Damaris Doukaya se ressemblent et se croisent. Elles seront définitivement liées à partir d’octobre 2014, quelques mois après leur retour au Cameroun… L’une d’elles est en effet dénoncée par un membre du comité local de surveillance comme étant une espionne de Boko Haram. Suite à un interrogatoire, les trois autres femmes sont à leur tour mises en cause. Elles sont alors toutes les quatre accusées d’espionnage, d’immigration clandestine et de complicité avec une bande armée. Le 1er avril 2016, alors qu’elles n’ont eu qu’un seul contact avec leur avocate, débute une parodie de procès devant un tribunal militaire. Au cours ce celui-ci, elles nient tout lien avec Boko Haram. Mais le 18 avril 2016, sans aucune preuve matérielle, Kilanta, Martha, Marie et Damaris sont condamnées à mort. Il n’y a pas d’appel possible.
La prolifération des condamnations dans le cadre de procès inéquitables
Leur histoire n’est pas un cas isolé. Depuis juin 2015, pas moins de 100 personnes accusées d’appartenir à Boko Haram ont été condamnées à la peine capitale par des tribunaux militaires, chargés de juger les terroristes ou leurs soutiens au Cameroun. Ces tribunaux militaires relevant du pouvoir exécutif, leur manque d’indépendance et d’impartialité suscite de vives préoccupations quant à la régularité des procédures qu’ils entreprennent. Les décisions prises dans le cadre de ces affaires ont souvent des répercussions irréversibles, comme l’illustrent les nombreux cas de condamnations à mort.
La loi antiterroriste du 23 décembre 2014, un virage dangereux
La loi antiterroriste de 2014 a été adoptée pour répondre à la menace grandissante que représentait Boko Haram pour le Cameroun. Malheureusement, cette loi prévoit des sanctions extrêmement lourdes et dramatiques - comme la peine de mort - en contradiction avec les engagements du Cameroun sur le plan international. Par ailleurs, la loi donne une définition bien trop large du terrorisme : toute grève, manifestation ou appel à la désobéissance civile peut être assimilé à un acte de terrorisme. Une telle situation peut conduire à des dérives répressives à l’encontre de membres de la société civile et de l’opposition politique, et à une restriction globale des droits fondamentaux dans le pays.