Harcèlement d’un détenu schizophrène
Hosman Polo Carrillo est détenu à la prison de haute sécurité La Tramacua à Valledupar (département de César, au nord). Il souffre de troubles psychologiques sévères pour lesquels il ne reçoit pas de soins. Les gardiens le harcèlent et violentent constamment sans être inquiétés.
Hosman Polo Carrillo est un détenu de droit commun. Il a été condamné à l’âge de 17 ans à une peine de prison de 29 ans et six mois. Ses conditions de détention très dures, les punitions injustifiées et les mauvais traitements à répétition ont entraîné ses problèmes psychiques. Il a tenté de se suicider par deux fois, lors de crises schizophréniques.
Sa maladie a été formellement diagnostiquée le 1er mars 2011. Depuis, il a été torturé à au moins trois reprises. En mai 2011, cinq gardiens l’ont passé à tabac puis ont lancé une bombe de gaz lacrymogène dans sa cellule.
En janvier 2013, un gardien chef l’a frappé, le laissant sérieusement blessé.
Le 20 décembre 2013, en représailles d’une de ses crises, des gardiens l’ont frappé à coups de pied, de poing et de matraque, lui ont infligé des décharges électriques au taser dans les testicules, l’ont aspergé de gaz poivre, ont brisé un verre au-dessus de son œil droit. Le détenu a souffert d’une blessure ouverte au visage, de multiples contusions sur le corps et la tête et d’une inflammation des testicules.
Dans les trois cas, la famille a porté plainte. Aucune procédure n’a encore abouti. Les gardiens mis en cause tentent régulièrement d’empêcher ou de nuire à la confidentialité des visites de M. Polo Carrillo avec ses avocats.
Contexte
Système carcéral en crise
Plus de 120 000 détenus sont entassés dans les prisons du pays. Ils souffrent de la promiscuité et de la violence engendrées par la surpopulation carcérale, de conditions d’hygiène déplorables, propices à la propagation de maladies (tuberculose, lèpre, hépatite, VIH, etc.) et aux intoxications alimentaires, du manque d’accès à l’eau potable et aux soins. S’ajoutent à cela des tortures et mauvais traitements infligés par des fonctionnaires de l’Institut national pénitentiaire et carcéral (INPEC) ‑ parfois même par certains directeurs de prison ‑ et par des membres de l’armée. Punitions collectives (restriction d’accès au téléphone, aux cellules, à l’électricité, à la nourriture, à l’eau potable), mises à l’isolement, pressions sur les proches lors des visites, simulacres d’exécution, passages à tabac, mises à nu, placements dans la position du « scorpion » (pieds et poings menottés ensemble), aspersions de gaz lacrymogène, agressions sexuelles et asphyxies sont les pratiques tortionnaires les plus courantes.
Selon des ONG colombiennes, au moins 20 % des prisonniers souffriraient de troubles mentaux plus ou moins directement liés à leurs conditions de détention.
Du 29 avril au 12 mai 2014, en lien étroit avec les 10 ONG locales qui composent la Coalition colombienne contre la torture, l’ACAT a rencontré des détenus des prisons La Picota, El Buen Pastor, La Tramacua et San Isidro. La totalité des prisonniers rencontrés a fait part de fouilles corporelles abusives, de transferts injustifiés, de mises à l’isolement prolongées (parfois des années) dans les unités de traitement spécial (UTE), de punitions collectives et de tortures (coups, décharges électriques) en représailles de plaintes. Les auteurs de tortures et mauvais traitements font parfois l’objet de sanctions administratives et disciplinaires, mais pratiquement jamais de condamnations pénales. L’ACAT recommande, notamment, la ratification du Protocole facultatif à la Convention contre la torture afin que des mécanismes de prévention et sanction de ces tortures et mauvais traitements en prison soient mis en place.
Source : Comité de solidarité avec les prisonniers politiques, FCSPP.