Bahreïn
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Emprisonné pour des tweets

Directeur du Centre bahreïni pour les droits de l’homme, Nabil Rajab est à nouveau en détention depuis le 2 avril 2015. Il est accusé d’insulte à corps constitué et de diffusion de fausses rumeurs par temps de guerre. L’arme du crime : des tweets dénonçant des violations des droits de l’homme.
Photo Nabeel

Directeur du Centre bahreïni pour les droits de l’homme, Nabil Rajab est à nouveau en détention depuis le 2 avril 2015. Il est accusé d’insulte à corps constitué et de diffusion de fausses rumeurs par temps de guerre. L’arme du crime : des tweets dénonçant des violations des droits de l’homme.

Le 2 avril dernier, des dizaines de policiers ont fait irruption au domicile de Nabil Rajab. Ils l’ont arrêté et conduit pour interrogatoire à la Direction générale de la sécurité électronique au sein du Département d’enquête criminelle, tristement célèbre pour son recours fréquent à la torture. Il a été interrogé sur ses tweets et un article publié dans le Huffington Post dénonçant des actes de torture perpétrés à la prison de Jaw où sont détenus de nombreux opposants politiques, ainsi que sur d’autres critiquant les frappes menées par l’armée saoudienne au Yémen, qui font de nombreuses victimes civiles. Ces publications lui valent d’être poursuivi pour insulte à corps constitué et de diffusion de fausses rumeurs par temps de guerre, des infractions pour lesquelles il encourt dix ans d’emprisonnement.

Primé à plusieurs reprises pour son combat en faveur des droits de l’homme, Nabil Rajab est victime d’un véritable harcèlement policier et judiciaire, accru depuis le début du mouvement de protestation qui secoue le royaume bahreïni en février 2011. En 2012, il a été condamné à deux ans d’emprisonnement pour des tweets appelant à la démission du Premier Ministre. Libéré en mai 2014, il a de nouveau été interpelé à la fin de l’année, toujours en raison de ses publications sur tweeter. Libéré provisoirement, il a finalement été condamné à six mois d’emprisonnement le 20 janvier 2015 pour avoir insulté l’armée et les institutions publiques. L’appel interjeté par ses avocats est toujours en cours. Nabil Rajab fait par ailleurs l’objet d’une enquête pour incitation à la haine contre le régime.

La prochaine audience dans le cadre du procès pour insulte à corps constitué aura lieu le 14 mai prochain.

Contexte

Dans une série de tweets et un article publié dans le Huffington Post le 27 mars dernier, Nabil Rajab a dénoncé le recours à la torture par les forces de sécurité pour réprimer des troubles qui ont éclaté le 10 mars au sein de la prison de Jaw où sont détenus de nombreux opposants politiques. Selon le Centre bahreïni pour les droits de l’homme, qui a pu collecter des témoignages dans les semaines qui ont suivi, des gendarmes et des policiers anti-émeutes sont intervenus dans la prison pour mater des troubles nés d’une altercation entre des gardiens et la famille d’un détenu privé de visite.

Les forces de sécurité ont fait irruption dans les bâtiments 1, 3, 4 et 6 de la prison. Ils ont aspergé les détenus de gaz lacrymogène, leurs ont jeté des grenades assourdissantes et leurs ont tiré dessus avec des balles en caoutchouc et des grenailles. Puis ils les ont fait sortir dans la cour et, pendant plusieurs jours, ils les ont battus et humiliés, les forçant à insulter leur famille, à chanter des chants pro-régime ou encore à embrasser les chaussures des agents. Des dizaines de prisonniers ont été blessés et sont ensuite restés plus de 10 jours (et, pour certains, plusieurs semaines) sans aucun contact avec leur famille.

En janvier 2015, Nabil Rajab a été condamné à six mois d’emprisonnement pour avoir révélé sur tweeter que sur la centaine de militants bahreïnis de l’État islamique, au moins un était issu des rangs des forces de sécurité. Il a dénoncé le fait que les autorités bahreïnies promouvaient l’idéologie du groupe terroriste en diffusant au sein de la police et de l’armée des ouvrages qualifiant les chiites d’hérétiques. Il a aussi critiqué le fait que la loi antiterroriste bahreïnie est avant tout utilisée à l’encontre d’opposants politiques. De même, sur les 72 personnes illégalement déchues de leur nationalité en janvier 2015, plus des deux tiers sont des journalistes, défenseurs des droits de l’homme, opposants politiques et responsables religieux chiites, seul un tiers étant des membres d’al-Qaeda ou de l’État islamique.

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