Les migrants doivent pouvoir demander l'asile dans le pays de leur choix
Bassel a fui l’oppression et la guerre. Il veut vivre libre en Suède. A la frontière entre la Hongrie et l’Allemagne, Bassel regarde ses doigts avec angoisse. Il sait que son destin et celui de toute sa famille va se jouer à peu de choses : l’endroit où il donnera ses empreintes. Si elles sont prises en Suède, le pays où il aspire à s’installer, il sera logé, nourri, et pourra chercher un travail pendant que les autorités suédoises examineront sa demande d’asile. Si en revanche, c’est la police hongroise qui les prélève, son rêve s’arrêtera là : même s’il parvient à gagner la Suède, il ne pourra y rester. Il sera renvoyé en Hongrie où ses chances d’obtenir l’asile sont bien moindres.
Telle est la dure réalité du règlement de « Dublin » : un système kafkaïen qui interdit aux exilés de décider dans quel pays ils vont demander l’asile.
Le sort de Samir, Syrien soutenu par l’ACAT, est tout aussi kafkaïen. La France et la Suède jouent au ping pong avec lui, et se renvoient la responsabilité de l’accueillir. La France lui a accordé un visa, mais le hasard a fait qu’il a atterri en Suède, où on lui a pris ses empreintes. La Suède a refusé d’examiner sa demande puisque son visa est français. Arrivé en France, la « logique » de Dublin lui imposerait de retourner à Stockholm. Absurde. Inhumain.
L’ACAT dénonce « Dublin », un règlement injuste qui contraint les migrants à déposer leur demande d’asile dans le premier pays européen où ils arrivent, c’est-à-dire, majoritairement en Grèce, en Italie et plus récemment en Hongrie, qui doivent faire face à un afflux massif de migrants. En septembre 2015, sur plus de 350 000 exilés qui ont atteint les rives de l’Union européennes, 244 000 sont arrivées en Grèce.
Comme toute réponse sécuritaire au désespoir des migrants, le règlement de Dublin peut s’avérer mortifère : pour contourner ces règles, et passer les frontières, ils sont obligés de prendre des risques énormes.
Mais il n’y a pas que les ONG : aux Nations unies, certaines voix font le constat de l’échec systémique de ce règlement, et appellent les États européens à permettre aux demandeurs d’asile de déposer leur demande dans le pays de leur choix. De son côté, le Commissaire aux droits de l’homme du Conseil de l’Europe s’est exprimé début septembre en faveur de la révision des règles de Dublin.
Synonyme d’errance, de renvois entre différents pays, et de délais d’attente extrêmement longs, Dublin impose des parcours d’exil absurdes pour des personnes déjà fragilisées. Jusqu’à quand l’Europe compte-t-elle pérenniser ce mécanisme injuste et défaillant ? Les demandeurs d’asile ont fui l’oppression pour être libres, libres de choisir leur pays d’accueil.