Bahreïn
Action

Le silence assourdissant de la France

Il voulait juste vivre dans une démocratie et que ses concitoyens jouissent du respect de leurs droits fondamentaux, comme tout être humain. Autant de revendications légitimes qui valent aujourd’hui à Abdulhadi al-Khawaja de croupir dans une geôle d’où il voit la répression s’abattre chaque jour davantage sur ses proches.
khawaja

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Il voulait juste vivre dans une démocratie et que ses concitoyens jouissent du respect de leurs droits fondamentaux, comme tout être humain. Avec pour seules armes sa voix et son courage, il a clamé haut et fort les attentes du peuple bahreïni en appelant à la fin de la torture, des arrestations arbitraires, des discriminations exercées à l’encontre de la majorité chiite dans ce royaume gouverné par une minorité sunnite. Autant de revendications légitimes qui valent aujourd’hui à Abdulhadi al-Khawaja de croupir dans une geôle d’où il voit la répression s’abattre chaque jour davantage sur ses proches, dans le silence assourdissant des chancelleries occidentales et particulièrement de la France.

Abdulhadi al-Khawaja a été arrêté le 9 avril 2011. Ce dano-bahreïni, fondateur du Centre bahreïni pour les droits de l’homme a été violemment battu au cours de son arrestation, puis détenu incommunicado et torturé pendant un mois dans la prison militaire d’Al-Qareen. Insultes, humiliations, tortures et sévices sexuels se sont succédés jusqu’à sa première présentation devant un juge le 8 mai suivant. Les violences se sont poursuivies tout au long de sa poursuite devant la Cour de sûreté de l’État. Cette dernière l’a condamné à l’emprisonnement à perpétuité le 22 juin 2011, sur la base d’aveux signés sous la torture. Une peine confirmée à plusieurs reprises sans qu’aucune enquête ne soit diligentée concernant les sévices subis.

Au Bahreïn, la défense des droits de l’homme a un coût élevé et la famille al-Khawaja en paie le prix fort.

Maryam al-Khawaja, 27 ans, fille d’Abdulhadi et co-directrice du Centre du Golfe pour les droits de l’homme, a été arrêtée le 30 août dernier à l’aéroport de Manama alors qu’elle se rendait au Bahreïn pour visiter son père, très affaibli par sa dernière grève de la faim. Libérée près de trois semaines plus tard, elle est aujourd’hui poursuivie pour avoir prétendument agressé deux membres des forces de sécurité à son arrivée à l’aéroport.

Sa sœur ainée, Zainab, enceinte de huit mois, vient d’être arrêtée le 14 octobre après avoir déchiré une photo du monarque et clamé son droit à la liberté dans un tribunal où elle comparaissait pour insulte au roi. Elle est actuellement poursuivie dans cinq affaires et a déjà été condamnée dans huit autres, toutes relatives à son militantisme pacifique en faveur des droits de l’homme et pour la libération de son père.

Enfin, Salah al-Khawaja, le frère d’Abdulhadi, a été arrêté en 2011 dans la même affaire que lui et condamné à cinq ans d’emprisonnement sur la base d’aveux extorqués sous la torture.

Tombés dans les oubliettes de l’amitié diplomatique franco-bahreïnie

Le sort réservé à Abdulhadi al-Khawaja a été dénoncé par les Nations unies, l’Union européenne, ainsi que par une commission d’enquête indépendante bahreïnie, créée par le roi en 2011 et composée d’experts internationaux. Mais le régime bahreïni continue à faire la sourde oreille, encouragé en cela par silence complice de la communauté internationale et notamment la France.

Face aux graves violations des droits de l’homme perpétrées par les autorités bahreïnies, la France se contente d’appels à la retenue aussi rares que timides. Le dernier exemple en date concerne le défenseur des droits de l’homme Nabeel Rajab, cofondateur du Bahrain Center for Human Rights (BCHR) avec Abdulhadi al-Khawaja, arrêté pour avoir publié un tweet critique vis-à-vis des forces de sécurité du royaume. Il aura fallu attendre 15 jours et une forte pression des ONG de défense des droits de l’homme pour que le ministère des Affaires étrangères français fasse une déclaration appelant la justice bahreïnie à la « clémence », alors qu’une arrestation pour un tweet constitue tout simplement une violation grave et flagrante de la liberté d’expression.

Un mois et demi plus tôt, la France avait une nouvelle brillé par son manque de soutien plus que patent à la cause des droits de l’homme au Bahreïn en accordant l’immunité au Prince Nasser, l’un des fils du roi venu participer à une compétition équestre en Normandie alors qu’il est accusé de torture par plusieurs détenus condamnés dans la même affaire qu’Abdulhadi et Salah al-Khawaja.

Abdulhadi et sa famille, quant à eux, semblent définitivement tombés dans les oubliettes de l’amitié diplomatique franco-bahreïnie.

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