8 ans de prison et risque de torture comme cadeau de Noël
Au lendemain de Noël, le militant des droits de l’homme Wu Gan, 44 ans, a été condamné à huit ans de prison pour « subversion » le 26 décembre 2017. Dans une déclaration publiée après sa condamnation, il indique avoir été torturé durant sa détention. Il risque toujours d’être soumis à de la torture et des traitements cruels, inhumains ou dégradants.
Wu Gan a été arrêté en mai 2015 alors qu’il travaillait pour un cabinet d’avocats de Pékin. Il prenait alors part à une manifestation dénonçant une erreur judiciaire dans une affaire passible de la peine de mort. Il a été officiellement accusé d'«incitation à la subversion du pouvoir de l’État ».
Ce militant, célèbre en Chine depuis 2009, est reconnu pour ses méthodes innovantes, qui consistent à lier les actions en ligne et sur le terrain, à mettre en lumière les violations des droits des droits de l’homme et à collecter des fonds sur Internet pour financer ses activités.
Peu après avoir été condamné en décembre 2017, Wu Gan a publié une déclaration dans laquelle il affirme avoir rejeté la demande des autorités qui lui demandaient de plaider coupable en échange d'une sentence plus clémente. Il a également cité 13 agents qui l'auraient torturé durant sa détention. Avant son procès à huis clos qui s'est déroulé le 14 août 2017, Wu Gan a été détenu pendant plus de 28 mois sans pouvoir communiquer avec sa famille. Il risque à nouveau d’être torturé.
Wu Gan et ses avocats avaient annoncé, avant sa condamnation, qu'il ferait appel s'il était déclaré coupable. Cependant, lorsque les avocats ont demandé à rencontrer leur client juste après la sentence, le centre de détention a refusé leur requête. Les avocats de Wu Gan n'ont pu le rencontrer que la veille de l’expiration de la période légalement prescrite pour déposer un appel, le 5 janvier 2018. Ils ont finalement réussi à interjeter appel in extremis.
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Contexte
« S’opposer résolument à toute parole et action de nature à saper » le pouvoir
La sentence de Wu Gan est la plus lourde infligée à des dissidents en Chine depuis juin 2016. Elle est aussi la plus sévère en 2017 depuis que le président Xi Jinping a promis de « s’opposer résolument à toute parole et action de nature à saper » l’autorité du Parti communiste chinois.
Depuis 2015, la répression en Chine contre la société civile est sans précédent. Des centaines d’avocats et militants des droits de l’homme ont été arrêtés et incarcérés. Certains ont été libérés avec de graves troubles psychologiques en raison des traitements subis en détention.
Les militants et les défenseurs des droits de l’homme continuent d'être systématiquement soumis à une surveillance, au harcèlement et aux intimidations, à des arrestations et placements en détention ainsi que des condamnations. De plus en plus de défenseurs sont retenus par la police dans des lieux de détention non officiels, parfois sans pouvoir consulter un avocat pendant de longues périodes, ce qui les expose au risque de subir des actes de torture et d’autres formes de mauvais traitements.
Condamner des dissidents entre Noël et le Jour de l’an lorsque l’opinion publique internationale est moins vigilante
La Chine comme d’autres pays est connue pour arrêter ou condamner arbitrairement des personnalités emblématiques pendant les périodes de fêtes lorsque les pays occidentaux détournent leur attention : arrestation du militant Hu Jia le 27 décembre 2007 ; condamnation le 25 décembre 2009 de Liu Xiaobo, prix Nobel de la paix décédé en prison en 2017…
Au moment de la condamnation de Wu Gan, l’avocat Xie Yang, pour qui l’ACAT est intervenue (voir appels urgents de janvier et de mai 2017), et dont le cas avait attiré l’attention des pays occidentaux, a également été condamné pour subversion. Il a cependant été dispensé de peine pour avoir accepté de plaider coupable. Xie Yang avait été également arrêté en 2015. Après avoir été maintenu au secret pendant six mois, il avait dénoncé, via ses avocats, les actes de torture subis en détention. Les sévices endurés ont cependant eu raison de lui. En mai 2017, lors d’une mascarade de procès, il avait plaidé coupable puis présenté des excuses pour avoir induit l’opinion en erreur « sur cette question de torture ». Il a ainsi été dispensé de peine en raison de son « repentir ».