L’épouse de Naâma Asfari refoulée par le Maroc
Le 19 octobre, les autorités chérifiennes ont interdit l’entrée sur le territoire marocain à Claude Mangin, l’épouse du prisonnier politique sahraoui Naâma Asfari, sans fournir d’explication. Cette mesure témoigne d’un durcissement de la politique marocaine visant à passer sous silence l’occupation du Sahara occidental et les violations graves des droits de l’homme qui lui sont afférentes.
Cela fait des années que Claude Mangin, ressortissante française, se rend au Maroc plusieurs fois par an pour visiter son mari emprisonné depuis 2010. C’est la première fois qu’elle est ainsi refoulée. Elle rejoint la longue liste des militants, avocats, personnalités politiques et journalistes renvoyés par le Maroc en raison de leur intérêt pour la question sahraouie.
Claude Mangin espérait fêter ses 13 ans de mariage et apporter à son mari le réconfort dont il a besoin depuis qu’il a été arbitrairement arrêté et torturé dans le cadre du démantèlement du camp de protestation de Gdeim Izik en novembre 2010.
Elle devait aussi le consulter sur sa stratégie de défense alors que son procès va se rouvrir devant la Cour d’appel de Rabat après la cassation de sa condamnation en juillet dernier. Ce procès sera une nouvelle occasion de dénoncer l’iniquité du premier procès à l’issue duquel le tribunal militaire avait condamné Naâma et ses 23 coaccusés à de lourdes peines sur la base d’aveux forcés. En refoulant Claude Mangin au mépris du droit des prisonniers à recevoir des visites de leur famille, les autorités marocaines tentent d’isoler son mari et de le réduire au silence.K
Contexte
Cela fait trois ans que Naama Asfari et ses coaccusés ont été condamnés pour leur participation présumée au camp de protestation sahraoui de Gdeim Izik en novembre 2010. Au cours de l’évacuation forcée du camp, des affrontements ont éclaté entre l’armée et des manifestants sahraouis, au cours desquels neuf soldats marocains auraient trouvé la mort. Naama Asfari a été condamné à 30 ans d’emprisonnement pour meurtre alors même qu’il a été arrêté la veille du démantèlement. Torturé, battu, humilié, pendant sa garde à vue en 2010, il avait signé des aveux sous la contrainte. Avec lui, 24 autres militants sahraouis ont subi un sort similaire.
Leur condamnation a été prononcée à l’issue de neuf jours de procès inéquitable marqué notamment par la prise en compte d’aveux arrachés sous la torture. Les juges se sont refusés à tenir compte des allégations de torture formulées par les accusés et de satisfaire à leur demande d’expertise médicale, en violation du droit marocain et du droit international. Aucune preuve n’a été présentée prouvant l’implication des accusés dans le meurtre des agents de sécurité.
Depuis, les autorités marocaines s’emploient à faire taire toute critique des violations commises par le Royaume au Sahara occidental et notamment à l’encontre du groupe de Gdeim Izik. En avril 2016, l’avocate de Naâma Asfari et plusieurs de ses confrères avaient été expulsés alors qu’ils venaient témoigner leur soutien aux prisonniers de Gdeim Izik en grève de la faim.