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La détention provisoire de Ramy Shaath prolongée

Le 26 novembre dernier, le tribunal pénal du Caire a prolongé de 45 jours la détention provisoire de Ramy Shaath, un militant égypto-palestinien en prison depuis déjà 150 jours. Son épouse française, expulsée vers la France, reste toujours interdite de séjour en Egypte.
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Céline Lebrun Shaath devant l'Assemblée nationale à Paris le 27 novembre 2019 avec le portrait de son mari, Ramy Shaath / ©Christophe Meireis
Le 28 / 11 / 2019

Alors que l’audience de Ramy Shaath était prévue pour le mardi 26 novembre 2019, le procureur a soudainement déplacé l’audience un jour plus tôt, le lundi 25 novembre en début d’après-midi, probablement pour prendre de court les observateurs internationaux qui s’étaient annoncés. Par ailleurs, Ramy comme les autres prévenus convoqués ce jour, a assisté à l’audience depuis un box vitré insonorisé, rendant difficile tout échange avec son avocat et sa participation à l’audience. De plus, alors que le verdict devait être officiellement communiqué le lendemain, des journaux détenus par le gouvernement ou pro-gouvernementaux ont annoncé le verdict le soir même de l’audience, une preuve supplémentaire de l’opacité et de l’absence d’indépendance de la justice dans son fonctionnement. Annoncé publiquement le 26 novembre 2019, le verdict prolonge sa détention provisoire  de 45 jours.

Arrêté à son domicile le 5 juillet après minuit par une douzaine d’agents lourdement armés sans qu’aucun mandat ou motif ne lui ait été présenté, Ramy Shaath ne réapparaît que 36 heures plus tard devant le parquet de la Sûreté de l’État, sans avoir pu contacter son avocat ou sa famille. Malgré l’absence de toute preuve et de base légale incriminant ses activités pacifiques, il est accusé d’assistance à un groupe terroriste et rajouté à une affaire pénale déjà existante dans laquelle sont poursuivis plusieurs militants et opposants politiques. Son épouse, Céline Lebrun, une enseignante française résidant au Caire depuis sept ans et mariée à Ramy depuis un an, était présente lors de son arrestation. Elle a immédiatement été expulsée vers la France sans pouvoir prévenir les autorités consulaires françaises. Elle est désormais interdite de séjour en Egypte et ne peut donc rendre visite à son époux.

Ramy Shaath, fils de l’homme d’État palestinien Nabil Shaath, est un acteur important de la scène politique palestinienne et égyptienne de 48 ans. Habitant au Caire depuis 1977, Ramy fut lui-même un conseiller de Yasser Arafat. Il se fit également connaître pendant la révolution égyptienne de 2011 et contribua à la création de divers partis, mouvements et coalitions de gauche, libéraux ou pro-démocratie. Depuis 2015, il coordonne la branche égyptienne du mouvement BDS (Boycott-Désinvestissement-Sanctions), une campagne internationale faisant pression sur Israël pour le respect des droits des Palestiniens. Juste avant son arrestation, Ramy avait exprimé publiquement son opposition au Deal du Siècle pour la Palestine proposé par l’administration Trump, critiquant également le soutien de l’Égypte à cette initiative. Les militants du mouvement BDS font l’objet de nombreuses restrictions et poursuites judiciaires dans plusieurs pays, y compris en Europe et en France, visant à neutraliser le mouvement.

 

Vous voulez soutenir Ramy Shaath ?

- Téléchargez ce modèle de lettre, personnalisez-la avec vos coordonnées et adressez-la au procureur général égyptien Hamada al-Sawy, à l'ambassadeur égyptien en France et au représentant permanent égyptien auprès des Nations unies à Genève.

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CONTEXTE

Depuis la reprise du pouvoir par le régime militaire en 2013, l’Egypte connaît une dégradation extrêmement préoccupante en matière de droits humains. Pourtant, avec la Révolution du 25 janvier 2011, un espoir était né pour les Egyptiens rêvant d’un pays plus respectueux de la dignité humaine et de l’état de droit. Cependant, l’establishment militaire a toujours réussi à garder la main sur les affaires, empêchant ainsi tout pouvoir indépendant et démocratique de s’établir tout en utilisant habilement les failles et les erreurs des nouveaux dirigeants. La situation a définitivement basculé le 14 août 2013 lorsque les forces de sécurité, sous le commandement du Général Abdelfattah al-Sissi, massacrent les partisans du président Mohamed Morsi rassemblés sur les places de Rabaa et Ennahda au Caire, faisant entre 800 et 1000 morts selon différentes organisations de droits humains.

Très vite, al-Sissi s’impose comme l’homme fort de l’Egypte et réussit à se faire élire en 2014, puis à nouveau en 2018, remportant à chaque fois 97% des voix. De nouveaux amendements constitutionnels adoptés en avril dernier permettent à al-Sissi de rester au pouvoir jusqu’en 2030 tout en faisant de l’armée « la garante de la démocratie, de la Constitution et du caractère civil de l’État ». Cette modification entérine ainsi la possibilité pour l’armée d’intervenir à tout moment dans la vie politique, en s’opposant par exemple à des résultats électoraux qu’elle considérerait comme menaçant la démocratie, constitutionnalisant ainsi le coup d’état militaire.

Entre-temps, le régime s’est attaqué à toute opposition en commençant par les Frères musulmans, désignés comme groupe terroriste et dont est issu Mohamed Morsi – le premier président égyptien élu démocratiquement et récemment décédé en détention. Les autres mouvements politiques démocratiques, de gauche ou laïcs subissent également la répression. Les militaires s’en prennent aussi aux médias indépendants ainsi qu’aux activistes et défenseur·e·s des droits humains. Les autorités les accusent habituellement d’assistance à une organisation terroriste, d’appartenance à un groupe terroriste et de diffusion de fausses informations menaçant la sécurité de l’Etat.

En invoquant des liens supposés avec les Frères musulmans, le pouvoir poursuit ainsi des personnalités de la société civile, des défenseurs des droits humains et de membres de mouvements politiques laïcs ou de gauche devant des tribunaux spéciaux dit de la Sûreté de l’Etat, qui traitent des affaires terroristes. Parallèlement, la menace terroriste ne diminue pas et le régime y répond par toujours plus de répression : arrestations arbitraires, recours à la torture, procès inéquitables, condamnations à morts et exécutions, disparitions forcées et exécutions extra-judiciaires deviennent courants voire systématiques, entraînant encore plus de radicalisation.

Après la vague d’arrestations de juin dernier dans le cadre de l’affaire dite de l’Espoir, l’Egypte a connu des manifestations inédites les 20 et 21 septembre 2019. Le régime a réagi par une campagne d’arrestations massives sans précédent, entre 2500 et 4000 personnes arrêtées selon différentes sources. Parmi elles, on compte de nombreuses figures de l’opposition, des militants politiques ainsi que des avocats et des défenseurs des droits humains comme Mohamed El-Baker. Ces manifestations font suite à plusieurs vidéos d’un certain Mohamed Ali, un homme d’affaire égyptien exilé en Espagne qui accuse le Président al-Sissi et ses proches ainsi que l’armée de corruption et de gabegie. Ces révélations, bien que difficiles à vérifier, interviennent dans un contexte économique difficile pour des millions d’Égyptiens qui subissent de plein fouet les mesures d’austérité imposées depuis 2016 alors que l’armée s’impose plus que jamais comme l’acteur économique dominant.

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