Forcé de renvoyer ses avocats
Avocat en droits humains à Pékin, Yu Wensheng (余文生) représentait des pétitionnaires, des militants pour les droits civils, des adeptes de Falun Gong et, plus récemment, ses confrères avocats victimes de la répression en Chine. Il assurait notamment la défense de Wang Quanzhang, disparu depuis près de trois ans.
Yu Wensheng a été arrêté le 19 janvier 2018, alors qu’il accompagnait son fils à l’école. Il est resté trois mois durant en « résidence surveillée dans un lieu désigné », une particularité chinoise permettant de maintenir un détenu au secret de manière légale. Durant cette période, ses avocats et sa famille n’ont pas été autorisés à le voir. Les autorités en ont profité pour le radier du barreau de Pékin.
Ça n’est qu’au mois d’avril 2018 que les autorités l’ont officiellement arrêté et ont confirmé son emprisonnement au centre de détention de Xuzhou, 700 km au Sud de Pékin. Il est alors accusé de « subversion du pouvoir d’État » et d’ « obstruction du service public », des charges utilisées de façon récurrente pour criminaliser les défenseurs des droits humains.
Le même jour, les avocats de Yu Wensheng, Chang Boyang et Xie Yang, ont reçu un courrier écrit et signé par leur client, dans lequel il les renvoie et demande à son épouse de ne pas nommer d'autres avocats à leur place. Les autorités chinoises ont l'habitude de pousser les détenus à renvoyer les avocats indépendants afin d'assigner des avocats nommés par le gouvernement et fidèles à ce dernier. Avant son arrestation, Yu Wensheng avait préparé un témoignage écrit et vidéo déclarant qu'il ne renverrait jamais ses avocats de son plein gré s’il était arrêté. Il est donc très probable que l’avocat ait été victime de mauvais traitements, voire de torture.
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Contexte
Abandon de l’État de droit
Les avocats défenseurs des droits humains subissent une répression sans précédent en Chine depuis 2015. En 2017, plusieurs avocats ont été condamnés ou libérés, sortant de longs mois de détention au secret, physiquement et psychologiquement très fragilisés. En s’en prenant aux avocats, par définition garants de la loi, le pouvoir chinois prive les victimes d’abus de défenseurs, et le pays des principaux acteurs du respect de l’État de droit.
Derrière les murs de prison, la torture est coutumière
Beaucoup d’avocats et activistes des droits humains ciblés par la vague de répression de 2015 n’ont pu être libérés qu’après avoir plaidé coupable. Ces confessions forcées, obtenues sous la torture, sont parfois télévisées et diffusées sur les médias d’État. Une fois libérés, ceux qui osent rapporter les conditions dans lesquelles ils étaient détenus font état de terribles actes de torture. Les témoignages évoquent entre autres l’application de chocs électriques sur diverses parties du corps, l’ingurgitation forcée de substances médicamenteuses, les privations de sommeil, les ratonnades et les violences verbales et psychologiques.
Harcèlement physique, psychologique et judiciaire des proches
Lorsque les autorités s’en prennent à un défenseur des droits humains, elles ne se contentent pas de l’enfermer et de le punir : elles s’en prennent également à ses proches et ses soutiens. Suite à l’arrestation de Yu Wensheng, son épouse Xu Yan (许艳) a été interrogée par la police, menacée d’être elle aussi poursuivie en justice pour subversion et placée sous haute surveillance.