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Disparition forcée d’Ibni Oumar Mahamat Saleh, un crime d’État passé dans l’oubli

Dix ans après l’enlèvement à N’Djamena de l’opposant tchadien Ibni Oumar Mahamat Saleh, par des éléments de la garde présidentielle tchadienne, force est de constater que ce crime d’État est tombé dans l’oubli.
VE-IBNI SALEH-24
Le 31 / 01 / 2018

Dix ans après l’enlèvement à N’Djamena de l’opposant tchadien Ibni Oumar Mahamat Saleh, par des éléments de la garde présidentielle tchadienne, force est de constater que ce crime d’État est tombé dans l’oubli.

 

Le 3 février 2008, l’opposant tchadien Ibni Oumar Mahamat Saleh – président du Parti pour les libertés et le développement (PLD) et porte-parole de l’opposition – est enlevé à son domicile de N’Djamena par des militaires de la garde présidentielle tchadienne, devant sa femme et le dernier de ses fils. Ibni Oumar Mahamat Saleh meurt très probablement en détention dans les jours qui suivent.

« Pendant près d’une décennie, les autorités tchadiennes ont fait semblant d’enquêter sur cette disparition forcée, tout en évitant soigneusement que la vérité soit établie et connue » affirme Clément Boursin, responsable Afrique à l’ACAT-France.

Fin février 2008, le président de la République Nicolas Sarkozy promet que « la France veut la vérité et je ne céderai pas sur ce point ». Face à l’absence d’avancée de la justice tchadienne sur le sujet et face au manque d’initiatives prises par la France pour que la vérité éclate, le 25 mars 2010 les députés de l’Assemblée nationale votent à l’unanimité une résolution demandant au gouvernement français de faire pression sur les autorités tchadiennes afin que toute la lumière soit faite sur la disparition d’Ibni Oumar Mahamat Saleh[1].

Consciente qu’elle ne pouvait rien n’attendre du régime en place au Tchad, la famille d’Ibni dépose, le 7 février 2012, une plainte devant le tribunal de grande instance de Paris, avec constitution de partie civile pour enlèvement, séquestration, torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants.  En avril 2014, l’ACAT, qui soutient la famille d’Ibni, se constitue partie civile dans cette affaire afin d’apporter davantage de poids à la plainte.

La France a oublié Ibni Oumar Mahamat Saleh

Alors que la « France continue d'appeler de ses vœux la manifestation de la vérité sur le sort d'Ibni Oumar Mahamat Saleh et cette question fait partie intégrante de nos échanges avec les autorités tchadiennes » (ministère des Affaires étrangères)[2], il ne faut plus attendre grand-chose des autorités françaises dans cette affaire. Avec le soutien militaire tchadien à l’intervention militaire française au Mali en 2013, le président Idriss Déby Itno redevient un allié stratégique de premier plan pour la France dans la lutte contre le terrorisme au Sahel et dans le Sud libyen. Idriss Deby Itno est intouchable.

D’un point de vue judiciaire, la procédure, engagée depuis maintenant six ans, avance très lentement en France, donnant un sentiment de stagnation. Par ailleurs, une partie de la famille de l’opposant disparu s’est rapprochée du régime en place à partir de 2015, obtenant en 2016 et 2017 des postes importants et rémunérateurs dans des entreprises et banques publiques. Ce rapprochement a rendu la famille d’Ibni moins active en France pour faire progresser la Justice. Ce ralliement a fortement déstabilisé les soutiens qu’avaient obtenus la famille d’Ibni, particulièrement au sein du monde politique et de la société civile.

La disparition forcée d’Ibni Oumar Mahamat Saleh reste encore aujourd’hui un symbole des victimes oubliées de l’histoire politique mouvementée du Tchad.

« Œuvrer pour que justice soit rendue à Ibni, c’est donc œuvrer en faveur des droits de l’homme et de l’État de droit au Tchad » indique Clément Boursin, responsable Afrique à l’ACAT-France.

Les autorités françaises, notamment le ministère de la Défense, devront peut-être un jour répondre aux éventuelles demandes de la justice française de déclassifier tous les documents, y compris ceux classés secret défense, relatifs aux événements de février 2008 à N’Djamena. Jusqu’ici, les demandes récurrentes à ce sujet n’ont pas donné de résultats.

 

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