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Cinq questions-réponses pour mieux comprendre l’importance de se mobiliser pour Luaty Beirão

Mieux comprendre, pour mieux se mobiliser : Qui est Luaty Beirão ? Que lui arrive-t-il ? Qu’en est-il de la situation politique et des droits de l’homme en Angola ? Pourquoi se mobiliser pour Luaty Beirão est-il important ? Que pouvons-nous faire concrètement ? A travers ces questions et les réponses apportées, l'ACAT dresse un portrait de Luaty Beirão, un rappeur emprisonné pour ses opinions politiques.
Collage Angola17
Le 16 / 06 / 2016

 

 

  1. Qui est Luaty Beirão ?

Henrique Luaty da Silva Beirão, dit Luaty Beirão, 34 ans, est un rappeur angolo-portugais connu sous le nom de « Ikonoklasta », très engagé en faveur de la démocratie et de la lutte contre la corruption en Angola. Depuis des années, Luaty Beirão utilise sa musique pour sensibiliser la jeunesse et porter des messages critiques sur le régime en place. En 2011, Luaty Beirão a été à l’origine de plusieurs manifestations – dont des concerts de rap – dénonçant la volonté du président José Eduardo dos Santos, au pouvoir depuis 1979, de se maintenir en place. Au cours des cinq dernières années, son engagement et ses convictions lui ont ainsi valu diverses attaques à son domicile, agressions en pleine rue, menaces auprès de sa famille, passages à tabac, arrestations… Luaty Beirão paye cher le prix de son combat pour la liberté et la justice.

 

  1. Que lui arrive-t-il ?

Son arrestation :

Le 20 juin  2015, Luaty Beirão a organisé à son domicile, en banlieue de Luanda, un atelier de réflexion sur l’alternance démocratique autour du livre de Gene Sharp : « De la dictature à la démocratie : un cadre conceptuel pour une libération » qui décrit des moyens de résistance non violente pour faire face aux régimes répressifs. Treize autres jeunes activistes (étudiants, professeurs, journalistes et artistes, âgés de 18 à 33 ans), pour la plupart membre de Central Angola 7311 - une plateforme en ligne créée pour dénoncer les violations des droits de l’homme - y étaient réunis pour disserter de techniques pacifiques de protestation contre le régime du Président José Eduardo dos Santos. Quelques heures plus tard, ils ont tous été arrêtés illégalement, sans mandat. Ces arrestations arbitraires ont été justifiées par le procureur de la République de l’Angola comme une opération visant à « prévenir un coup d’État ». Pourtant, personne n’est dupe. Ces arrestations avaient pour unique but d’étouffer un mouvement contestataire qui n’hésitait pas à user de leurs libertés d’expression, de manifestation et de réunion pour appeler à l’alternance politique en Angola.

Trois autres jeunes, non présents à cet atelier, ont été poursuivis dans cette affaire et condamnés.

 

Sa condamnation :

Luaty Beirão a été condamné le 28 mars 2016 par la justice angolaise à 5 ans et demi de prison pour « rébellion contre le président de la République, association de malfaiteurs et falsification de documents ». Ses seize camarades[1] ont été condamnés à des peines allant de 2 à 8 ans et demi de prison. Les peines ont été prononcées sur la base d’aucune preuve concrète et à l’issue d’un procès-fleuve, entamé le 16 novembre 2015 et qui était censé durer 3 jours. La procédure a été interrompue à douze reprises et de nombreux vices de procédures ont été constatés. Ces condamnations sont politiques. Le tribunal – clairement aux ordres du pouvoir exécutif –  a voulu punir cette jeunesse angolaise qui a eu l’audace et le courage d’utiliser ses droits de s’exprimer et de se réunir pacifiquement sur une thématique sensible : l’alternance démocratique en Angola. Leurs avocats ont saisi la Cour suprême et formé une requête en habeas corpus devant la Cour constitutionnelle. Ces recours n’ont pas encore été examinés.

 

Ses conditions de détention :

Luaty Beirão a été incarcéré à la prison de Viana, à Luanda. Les conditions de détention y sont difficiles (surpopulation carcérale, conditions d’hygiène insuffisantes, personnel pénitentiaire violent) et Luaty Beirão a beaucoup maigri, notamment après une première grève de la faim en septembre-octobre 2015 (pour dénoncer l’illégalité de sa détention). A la suite d’une crise de paludisme, début mai 2016, il a été transféré de force à l'hôpital pénitentiaire de Sao Paolo, situé également dans la capitale angolaise, pour recevoir des soins antipaludéens. Les conditions de détention y sont meilleures. Pour protester contre ce procédé, qu’il considère comme non équitable par rapport aux autres détenus de Viana, Luaty Beirão a entrepris une nouvelle grève de la faim et a décidé de se dévêtir et de rester nu. Luaty Beirão ne souhaite pas de traitement de faveur. Il souhaite être maintenu en détention à la prison de Viana afin d’y dénoncer les conditions de détention infrahumaines.

 

  1. Qu’en est-il de la situation politique et des droits de l’homme en Angola ?

Un régime autocratique au pouvoir depuis 1979 qui ne fait aucun effort

Depuis la fin de la guerre civile en 2002, l’Angola est en pleine reconstruction. Sa croissance économique impressionnante dans les années 2000, et sa domination politique voire militaire sur ses voisins congolais (RD Congo et Congo-Brazzaville) lui ont permis de redevenir une puissance géostratégique majeure dans la sous-région. Mais sur le plan interne, peu d’efforts ont été consentis par le régime en place pour améliorer la situation des droits de l’homme et œuvrer en faveur de l’ouverture démocratique et de la bonne gouvernance dans le pays. Il faut dire que le président, José Eduardo dos Santos est au pouvoir depuis 1979 et que son clan, famille et généraux, ont amassé une grande fortune après plus de 30 ans de mainmise sur le pays.

 

Une frange de la jeunesse contestataire, harcelée et réprimée par les autorités

Les mouvements d’opposition politique au sein de la jeunesse qui manifestent contre le pouvoir et la corruption font l’objet d’une répression continue. Depuis mars 2011, plusieurs manifestations pacifiques organisées à Luanda pour réclamer une alternance politique ont été réprimées avec un usage excessif de la force par des policiers et des personnes non identifiées. Un nombre important de jeunes ayant participé à l’organisation de ces manifestations ou ayant assisté à de tels événements ont été intimidés, enlevés, frappés et torturés par des hommes armés en tenue civile, vraisemblablement des membres des services de sécurité de l’État. Les membres du collectif Central Angola 7311 ont particulièrement été la cible d’agressions en marge de ces manifestations. Aujourd’hui, dix-sept d’entre eux sont en prison, une manière pour les autorités de les faire taire et de les punir.

 

  1. Pourquoi se mobiliser pour Luaty Beirão est-il important ?

Se mobiliser pour Luaty Beirão :

  • C’est se mobiliser pour ses seize camarades également en prison comme lui, détenus pour les mêmes raisons.
  • C’est se mobiliser pour la jeunesse angolaise, et plus généralement africaine, qui de Dakar à Khartoum, en passant par Kinshasa et Ouagadougou, se mobilisent pour mettre la bonne gouvernance et la démocratie au centre de leur action, conscientisent jour après jour la population sur leurs droits et interpellent les autorités sur les obligations et devoirs.
  • C’est montrer que nous sommes solidaires avec ces mouvements citoyens en Afrique qui, d’une manière générale, exigent des autorités qu’elles disent ce qu’elles font et fassent ce qu’elles disent.

 

  1. Que pouvons-nous faire concrètement ?
  • Interpeller, par courrier, les autorités angolaises afin qu’elles instruisent, rapidement et en toute indépendance, les recours interjetés par les avocats de Luaty Beirão et ses camarades, et rendent enfin le droit dans cette affaire : https://www.acatfrance.fr/public/13_06_2016_au_angola_lettre.doc
  • Aller au Concert de soutien organisé par l’ACAT avec deux rappeurs français (Sentinel Diego et Leeroy) qui ont souhaité se mobiliser pour leur confrère  rappeur angolais Luaty Beirão : Mardi 21 juin, 21h00-23h00 au Parvis de l'Eglise Saint Bernard, 11 rue Affre 75018 Paris

 

  • Interpeller, sur les réseaux sociaux, les autorités françaises sur ce sujet :

Avec les messages suivants :

 

  • La France doit se mobiliser pour la libération de Luaty Beirão et ses 16 camardes #Angola
  • #Angola Refusons les condamnations arbitraires de militants pacifiques
  • Justice doit être rendue pour Luaty Beirão #Angola
  • Je soutiens Luaty Beirão et ses droits à la liberté d’expression pacifique #Angola
  • Liberté pour Luaty Beirão et ses 16 camarades : la mascarade doit cesser #Angola
  • Le business avant les droits de l'homme en #Angola ? Je dis Non ! Liberté pour Luaty Beirão
  • Condamné injustement à 5 ans de prison ! Liberté pour Luaty Beirão #Angola
  • Refusons les atteintes à la liberté d'expression en #Angola ! Liberté pour Luaty Beirão

 

 

 

Pour de plus amples informations :

 

Contact :

Clément Boursin, Responsable Afrique à l’ACAT, 06 58 00 80 77 / 01 40 40 02 11, clement.boursin@acatfrance.fr

 

 

[1] Manuel Chivonde (« Nito Alves »), Nuno Álvaro Dala, Afonso Mahenda Matias (« Mbanza Hamza »), Nelson Dibango Mendes dos Santos, Hitler Jessy Chivonde (« Hitler Samussuko »), Albano Evaristo Bingobingo, Sedrick Domingos de Carvalho, Fernando António Tomás (« Nicolas o Radical »), Arante Kivuvu Italiano Lopes, Benedito Jeremias, José Gomes Hata (« Cheick Hata »), Inocêncio Antônio de Brito, Osvaldo Sérgio Correia Caholo, Domingos da Cruz, Laurinda Gouveia et Rosa Conde.

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