Encellulement individuel en prison : un nouveau report intolérable
Une personne détenue par cellule, tel était le principe que la France s’était engagée à respecter d’ici le 25 novembre 2014 [1]. Pourtant cet engagement reste lettre morte, les gouvernements successifs ayant sans cesse reporté l’application du droit à l’encellulement individuel, faute d’avoir agi pour le rendre effectif. Selon l’ACAT, il est urgent de mettre en place un numerus clausus en maison d’arrêt et de développer les alternatives à l’emprisonnement pour mettre fin à la surpopulation carcérale et respecter le droit à l’encellulement individuel.
La surpopulation des prisons françaises est chronique. Au 1er octobre 2014, plus de 12 100 détenus sont en surnombre [2]. Ils sont 11 800 pour les seules maisons d’arrêt, ce qui représente un quart des détenus de ce type d’établissement. Certaines prisons comptent deux fois plus de détenus qu’elles ne devraient. C’est le cas de la maison d’arrêt d’Orléans, où 245 personnes sont incarcérées bien qu’elle ne compte que 99 places, ou encore de la maison d’arrêt de Nice, comptant 612 détenus pour 363 places.
La solution ne peut venir de la multiplication du nombre de places de prison.
Des programmes de construction immobilière se sont succédés ces dernières décennies et ont donné naissance à de véritables usines carcérales, où la technologie et les impératifs de sécurité ont remplacé l’humain. Le nombre de personnes détenues a augmenté parallèlement au nombre de places de prison : construire plus n’a jamais permis de résoudre le problème de la surpopulation carcérale.
Pour que l’encellulement individuel soit une réalité, la France doit se donner les moyens de développer les alternatives à l’emprisonnement et le recours aux aménagements de peines. À une place de prison doit correspondre une seule personne détenue. « Un numerus clausus doit enfin être appliqué dans tous les établissements pénitentiaires. » recommande Aline Daillère, responsable prison, police, justice à l’ACAT.
La dignité de la personne, fut-elle en prison, est l’affaire de tous.
La surpopulation carcérale a de graves conséquences du point de vue du respect de la dignité humaine : insalubrité, promiscuité, absence totale d’intimité, sentiment d’humiliation. Plus de 1000 détenus dorment sur un matelas posé à même le sol. Cette situation aggrave les tensions et violences, fait obstacle à l’accès à des formations, emplois ou activités. Elle rend plus difficile l’accès aux services de santé et réduit les possibilités pour les proches des détenus de venir leur rendre visite. La surpopulation carcérale a des conséquences directes sur les chances d’insertion à la sortie de prison.
« Toute personne détenue a vocation à sortir un jour de prison. Il appartient aux pouvoirs publics de penser l’après dans le respect de la dignité humaine. Le droit à l’encellulement individuel doit être une priorité », rappelle Aline Daillère, de l’ACAT.
Contact presse :
Pierre Motin, 01 40 40 40 24 / 06 12 12 63 94 pierre.motin@acatfrance.fr
Notes aux rédactions :
- [1] Le 25 novembre 2014, les articles du code de procédure pénale prévoyant l'encellulement individuel entreront en application, au terme du moratoire de cinq ans prévu par l'article 100 de la loi pénitentiaire du 24 novembre 2009.
- [2] Au 1er octobre 2014, la France comptait 66 494 personnes détenues. A titre indicatif, à la même date, 44 721 personnes étaient détenues en maison d’arrêt. Ainsi, près d’un quart des détenus en maison d’arrêt sont en surnombre. Les détenus en surnombre correspondent au nombre de détenus incarcérés au-delà du nombre de places de prison opérationnelles et effectivement utilisées. (Sources : Ministère de la justice, OPALE 9.)