Un militant de Filimbi détenu au secret à Kinshasa
Jean de Dieu Kilima est détenu incommunicado dans un cachot de l’Agence nationale de renseignements (ANR) à Kinshasa. Cet étudiant de 27 ans a eu le malheur d’animer, dans la ville de Kisangani, une conférence de presse du Front Citoyen 2016 appelant à la tenue rapide de l’élection présidentielle. Il a osé défier pacifiquement le régime du président Joseph Kabila. Comme tant d’autres jeunes comme lui, il est désormais détenu injustement pour ses opinions politiques.
Le 8 juillet 2016, Jean de Dieu Kilima, membre de la coordination du Front Citoyen 2016 en charge de la mobilisation dans la province du Tshopo, a animé une conférence de presse à Kisangani afin de lancer la campagne de sensibilisation des populations sur les articles clés de la Constitution relatifs au mandat et à l’élection du Président de la République. En marge de cet événement, il a été arrêté par des agents de l’ANR au motif qu’il détenait des « documents subversifs » (il s’agissait d’un feuillet contenant les articles clés de la Constitution) et qu’il était membre d’une organisation non reconnue par les autorités. Après quatre jours de détention au secret dans une geôle de l’ANR, Jean de Dieu Kilima a été transféré au siège de l’ANR dans la capitale Kinshasa. Il est depuis lors détenu au secret, sans droit de visite.
Jean de Dieu Kilima est un étudiant en deuxième année de Génie civile à l’Université technologique internationale de Kisangani (UTIK). Il milite pour l’alternance politique dans son pays de manière pacifique, en demandant le respect de la Constitution.
Sa détention au secret est contraire au droit. Ses conditions de détention sont propices aux risques de torture et de mauvais traitements.
Interpellons la Commission nationale des droits de l’homme (CNDH) afin qu’elle veille au respect de ses droits !
Contexte
Qui sont Filimbi et Front Citoyen 2016 ?
Filimbi (le « sifflet » en swahili) est une plate-forme, créée en mars 2015, regroupant divers mouvements de jeunes, qui entreprennent des actions civiques en vue d’encourager la jeunesse à remplir ses devoirs citoyens et à s’impliquer dans le développement du pays dans le respect du droit.
Front Citoyen 2016 est une autre plate-forme, créé fin 2015, qui regroupe des organisations de la société civile (dont les associations de défense des droits de l'homme La voix des sans voix et l'Asadho), des mouvements citoyens pro-démocratie (comme Filimbi et Lucha), ou encore des opposants au président Joseph Kabila tels que Vital Kamerhe, Moïse Katumbi, Felix Tshisekedi, Martin Fayulu. Leur objectif est de mettre leurs forces et leurs moyens en commun pour dire non à un troisième mandat de Joseph Kabila et éviter tout glissement du calendrier électoral.
Un pouvoir de plus en plus répressif
Depuis janvier 2015, le régime au pouvoir harcèle de manière continue les membres de la société civile et de l’opposition qui se mobilisent en vue du respect de la Constitution. Cette Constitution ne prévoit que deux mandats présidentiels de suite. Le Président Joseph Kabila achève son second mandat en novembre 2016. Le 11 mai 2016, la Cour constitutionnelle l’a pourtant autorisé à rester en poste en cas de report du scrutin présidentiel. Auparavant, son gouvernement avait tenté en vain de modifier la Constitution ou les règles électorales afin de lui permettre de se maintenir au pouvoir. Face à la mobilisation citoyenne, ces tentatives avaient échoué. La décision contestée de la Cour constitutionnelle vise de nouveau à permettre au président en place, sous un vernis pseudo-démocratique, de se maintenir au pouvoir alors que son gouvernement a délibérément retardé la planification de l’élection présidentielle. Il y aurait actuellement plus d’une vingtaine de prisonniers politiques et d’opinion en RDC dont Fred Bauma et Yves Makwambla, deux jeunes membres de Lucha et Filimbi, incarcérés depuis mars 2015 et toujours en attente de jugement.