Trois militants injustement en prison
Le 20 mai 2016, Bienvenu Matumo, Marcel Héritier Kambale Kapitene, membres de Lutte pour le changement (LUCHA), et Victor Tesongo, militant de l’opposition, ont été condamnés à un an de prison pour avoir, soit disant, distribué des tracts mensongers.
Les 15 et 16 février 2016, Victor Tesongo puis Bienvenu Matumo et Marcel Héritier Kambale Kapitene ont été arrêtés à Kinshasa, la capitale, alors que se préparait l’opération « ville morte », organisée par l’opposition et la société civile afin de protester contre le retard accumulé dans l’organisation de l’élection présidentielle devant normalement se tenir en novembre 2016, d’après la Constitution. Ces trois jeunes sont des militants actifs en faveur du respect de la Constitution. En les arrêtant, les autorités ont voulu déstabiliser la tenue de cette opération « ville morte » et les punir de leurs activités pacifiques.
Le 20 mai, ils ont été condamnés à un an de prison pour avoir distribué des tracts mensongers, qui n’étaient pas les leurs et qu’ils n’ont, en réalité, pas distribués. Les charges retenues contre eux sont « incitation à la désobéissance civile » et « propagation de fausses nouvelles ». Or, les tracts à propos desquels ils ont été condamnés n’incitent en aucun cas à la désobéissance civile ni ne propagent de fausse nouvelle…
A l’issue du verdict, le directeur du bureau conjoint des Nations unies aux droits de l’homme, José Maria Aranaz, s’est dit très préoccupé par « l’instrumentalisation persistante de la justice, la criminalisation de la société civile ». Les avocats de la défense ont indiqué qu’ils avaient l’intention de se pourvoir en appel.
Contexte
Qui est le mouvement citoyen congolais Lutte pour le changement (LUCHA) ?
Il s’agit d’un mouvement de jeunes, créé en 2012, à Goma, chef-lieu de la province du Nord-Kivu, située dans l’est de la RDC. LUCHA organise des actions pacifiques (sit-in, marches, mobilisation des réseaux sociaux) sur des sujets relatifs aux droits fondamentaux des citoyens congolais (droits économiques, sociaux et politiques). Il s’agit d’une nouvelle forme de mobilisation citoyenne, particulièrement mobilisatrice auprès de la jeunesse.
Un pouvoir de plus en plus répressif
Depuis janvier 2015, le régime au pouvoir harcèle de manière continue les membres de la société civile et de l’opposition qui se mobilisent en vue du respect de la Constitution. Cette Constitution ne prévoit que deux mandats présidentiels de suite. Le Président Joseph Kabila achève son second mandat en novembre 2016. Le 11 mai 2016, la Cour constitutionnelle l’a pourtant autorisé à rester en poste en cas de report du scrutin présidentiel. Auparavant, son gouvernement avait tenté en vain de modifier la Constitution ou les règles électorales afin de lui permettre de se maintenir au pouvoir. Face à la mobilisation citoyenne, ces tentatives avaient échoué. La décision contestée de la Cour constitutionnelle vise de nouveau à permettre au président en place, sous un vernis pseudo-démocratique, de se maintenir au pouvoir alors que son gouvernement a délibérément retardé la planification de l’élection présidentielle. Cette situation risque de faire replonger le pays dans une instabilité politique aux conséquences dévastatrices pour les droits de l’homme et leur respect, dans un pays où les armes circulent librement et où l’usage de la violence politique est endémique depuis plusieurs décennies.
Une augmentation du nombre de prisonniers d’opinion dans le pays
Il y aurait actuellement plus d’une vingtaine de prisonniers politiques et d’opinion en RDC dont Fred Bauma et Yves Makwambla, deux jeunes membres de Lucha et Filimbi, un autre mouvement citoyen, incarcérés depuis mars 2015 et toujours en attente de jugement.
Pour de plus amples informations sur la RDC : http://www.acatfrance.fr/actualites/?pays=COD